Le dominicain Joseph Robert a rédigé des Cahiers de captivité durant ses années de stalag entre 1940 et 1945.
Joseph Robert (1910-1991), jeune dominicain, fait prisonnier en juin 1940, connaîtra différents camps de prisonniers en Allemagne. Il a tenu un journal que, plus de trente ans après sa mort, sa famille a souhaité éditer. On peut regretter que ce travail n’ait pas été confié à un éditeur, cela aurait permis une édition plus scientifique et avec moins de coquilles. Mais, tels qu’ils sont, ces Cahiers de captivité sont d’un grand intérêt. Le père Joseph Robert y expose son évolution spirituelle et intellectuelle – car il lit énormément. Il dit dans quelles conditions il peut exercer, ou non, son ministère et quel apostolat il essaie de faire. Peu de jours après son arrivée au stalag de Bad Orb, il commence une prédication sur le Rosaire, « avec chant et sermon », qui s’étalera sur quatre jours jusqu’au 8 août, fête de saint Dominique. Il note alors dans ses Cahiers : « La grâce travaille les âmes. De nombreuses confessions. Le mardi 200 communions. Le mercredi 670. Conversions continuelles. » Mais cette ferveur des prisonniers ne durera pas. Il est ensuite affecté dans un kommando de travail agricole, à Gelnharr, « minuscule village protestant ». Là, « sans messe, ni bréviaire, ni livre aucun, ni Bible, ni rosaire, dans le dur travail des moissons et des battages », il « découvre, écrira-t-il plus tard, ce que huit ans d’études n’avaient pas réussi à me vraiment révéler : transcendance de la vie théologale par rapport à la vie sacramentelle ; réalité et puissance du caractère sacerdotal ». Astreint à un travail manuel, dépouillé de sa fonction de prêtre, loin de sa communauté religieuse, il redécouvre le sacerdoce comme « une situation spirituelle unique ». En 1942, alors qu’il est interné au stalag de Rawa Ruska, il fonde, avec un autre prêtre et deux laïcs, l’Union des Prisonniers de Guerre (UPG) : un mouvement sans référence confessionnelle, fondé d’abord sur la solidarité et ouvert à tous, mais très structuré, avec une « règle d’honneur » à respecter et, pour les « upégistes » qui le souhaitent, une messe quotidienne, la prière du soir et un cercle d’étude de l’Évangile par semaine. L’UPG se répandra dans les autres stalags et comptera à la fin de la guerre 15 000 membres. Les Cahiers s’arrêtent en 1945, avec le retour en France.…