Son élection a fait jaillir la joie dans les rues de Chicago, suscité la perplexité dans les cercles catholiques conservateurs et réveillé une espérance insoupçonnée dans l’Église universelle. Premier pape américain, Léon XIV – ancien préfet du Dicastère des Évêques –hérite d’un pontificat lourd de défis. À la fois familier et énigmatique, il divise, interroge, mais surtout, appelle à la prière.
Joie exubérante ici, fierté nationale, louanges à Dieu qui a permis à « Rob » de devenir le successeur de saint Pierre. Incroyable ! Pour la plupart des catholiques plus traditionnels, stupeur initiale (qui est-il ? un autre moderniste ?) suivie d’une bienveillance sereine tempérée d’interrogations légitimes. Conscient de l’universalité de son ministère, Léon XIV, aussi diplomate que polyglotte, n’a d’abord parlé, à la loggia, qu’en italien (et un peu en espagnol). Il a attendu le lendemain pour entamer son homélie en anglais. Avec, bien sûr, l’accent de Chicago. Ses concitoyens n’en reviennent pas : le pape a grandi aux États-Unis ! Reste, pour tous ceux qui ont enduré douze années pénibles, beaucoup de questions encore sans réponses. Et une immense espérance pour un accès élargi à plus de beauté liturgique. Restons calmes, disent-ils, et donnons-lui une chance. Laissons agir les puissantes grâces divines que ce mystérieux Vicaire du Christ vient de recevoir. Surtout, prions pour lui !
Des interrogations
D’abord, les zones d’ombre. Léon XIV est celui qui, en 2023, alors chargé par François du Dicastère des Évêques, a écarté le plus exemplaire des bergers américains, Mgr Joseph Strickland, de son diocèse de Tyler, Texas (et aussi Mgr Rey de Fréjus-Toulon). Et il est celui qui a permis cette année au cardinal McElroy, complice de la dissimulation de scandales sexuels, de prendre la tête du diocèse-clé de Washington. Autre signal perçu comme alarmant : le cardinal Prevost a rabroué publiquement, en février dernier, le vice-président JD Vance qui défendait le concept pourtant fort thomiste d’ordis amore, selon lequel la charité doit s’exercer en priorité envers sa famille et son pays avant de s’étendre aux étrangers. Même hostilité du cardinal envers les efforts du président Donald Trump pour expulser du pays les immigrés entrés illégalement. Frictions prévisibles entre Léon XIV de Chicago et Trump de New York, aux tempéraments si différents ? Ou entente profonde sur la paix, la famille, le retour aux valeurs sûres – à condition de ne pas aborder le réchauffement climatique…