Depuis dix-huit ans, je témoigne dans les lycées et collèges catholiques de mon adolescence licencieuse et droguée où j’ai contracté le sida.
Les directeurs ou responsables de pastorale m’invitent à témoigner de mon itinéraire, en m’adaptant au public, confortant à travers mon expérience ce qu’enseigne l’Église. Parfois un professeur ne supporte pas ces vérités. Une fois, une femme parent d’élève, promotrice de la « prévention-capote », entraîna deux parents à porter plainte contre le directeur pour « non-assistance à personne en danger » parce que j’avais osé critiquer le préservatif et valorisé l’amour vrai. Le procureur n’avait pas poursuivi. Là, un militant homosexuel a réussi à me faire interdire de parole.
Les partisans de la licence morale ne supportent pas que l’on ne partage pas leur avis mais, à part quelques aléas, l’exigence de vérité est bien accueillie, en dépit des carences intellectuelles et spirituelles des jeunes d’aujourd’hui.
Les adolescents, même s’ils ignorent souvent la chasteté et une saine mixité, l’état de beaucoup de familles permettant difficilement une véritable éducation, ne sont jamais agressifs ou prétentieux, à la différence de trop d’adultes, démontrant par là qu’ils ont encore une soif qui peut être étanchée si des éducateurs dignes de ce nom leur transmettent le goût du bien, du beau et du vrai.
Mais avec un gouvernement qui préfère l’idéologie à la réalité, pourrons-nous encore parler librement aux jeunes de la vérité de l’amour et critiquer certains désordres ?
Dans deux écoles catholiques d’une même ville, un professeur vient de changer de sexe, mettant l’enseignement diocésain devant le fait accompli. Comment parler à ces élèves de la complémentarité sexuelle et de l’ordre naturel quand des professeurs ou parents d’élèves concernés par le problème, soutenus par « la force injuste de la loi » (François Mitterrand, à l’émission de TF1 : « La politique de la France dans le monde », Palais de l’Élysée, 16 décembre 1984), s’y opposeront ?
Certains établissements ex-catholiques ont choisi le conformisme et se soumettent à l’idéologie du Planning familial ou d’AIDES (association française de lutte contre le VIH/Sida). Mes rares expériences de lycées publics me font penser à ces établissements « privés de tout » qui ont renoncé à l’exigence de vérité, devançant en cela les désirs de Vincent Peillon.
Allons-nous, comme l’ont fait ces écoles en reniant leur mission, éluder et taire ces réalités et nous faire ainsi les complices des faussaires et des tricheurs ?
Et si une loi nous y oblige, que feront les établissements encore soucieux d’annoncer à leurs élèves la bonne nouvelle du salut à travers l’unité retrouvée de l’amour humain ?
Ces millions d’élèves des écoles sous-contrat ne peuvent être abandonnés au relativisme ambiant, c’est aussi la mission de l’Église de l’empêcher.
Dans la logique d’une escroquerie compassionnelle qui cache des mensonges anthropologiques, l’inique loi condamnant l’« homophobie » est une arme par destination pour réprimer les réfractaires. Il faut refuser de se soumettre à cette dialectique piégée dirigée contre la liberté de dire la vérité.
Comment parler de la beauté de l’amour humain à des jeunes déjà souillés par la pornographie insidieuse, voire formatés par des expériences sexuelles précoces ?
En leur parlant de la nature humaine « capable de Dieu » (saint Augustin) et appelée à s’unifier.
Demain, quand je rencontrerai des élèves victimes d’une propagande homosexuelle insidieuse, pourrai-je encore leur parler, respectueusement comme je le fais toujours, des risques propres à ces pratiques, leur faire distinguer l’être humain, doté d’une conscience et d’une liberté, de l’animal, régi par l’instinct et la nécessité, alors que l’idéologie fataliste qui prétend mutiler leur nature humaine veut nous imposer le mensonge par le silence ?
Comment dire que l’homme et la femme deviennent co-créateurs par leur amour humain sous le regard de Dieu à celui qui nie l’altérité sexuelle et la loi naturelle ?
Comment lui parler de l’amour de Dieu s’il ne croît pas à l’amour humain ?
La résistance est déjà engagée pour ceux qui ne peuvent renier leur conscience pour le confort illusoire de la résignation. Le témoignage de chacun d’entre nous, sous ses différentes formes, devient vital dans une société de mensonge et de confusion, pour éclairer ces jeunes qui sont capables d’entendre la vérité et assez généreux pour vouloir engager leur vie à son service. C’est la dignité de l’homme et de la femme aimés de Dieu et appelés à le connaître et l’aimer qui est en jeu.
Dominique MORIN
Cette Tribune libre a paru dans le numéro 1536 de L’Homme Nouveau, disponible sur ce site (voir le lien ci-dessous).