> L’Essentiel de Joël Hautebert
Derrière les mots d’ordre d’inclusion et d’égalité, les nouvelles luttes identitaires (de genre, de race ou de sexualité) reprennent les méthodes des combats révolutionnaires. Alimentées par une logique d’antagonisme, elles dressent les uns contre les autres, sans horizon commun, jusqu’à faire de la société un champ de confrontation permanente.
La progression continue vers le nihilisme s’appuie sur le recours tout aussi régulier aux méthodes d’action issues du marxisme. Dans son livre Comprendre la révolution woke (1), Pierre Valentin montre bien comment les luttes révolutionnaires contemporaines appuyées sur la trinité « Diversité, Inclusion, Équité » n’aboutissent qu’à une pure négation. L’exacerbation des identités communautaires de choix, ethniques, religieuses ou sexuelles, toutes présentées comme victimes, conduisent sous couvert d’inclusion à la lutte sans merci de tous contre tous. Les vives disputes au sujet de l’affiche de l’InterLGBT lors de la dernière « Marche des fiertés » l’ont remarquablement illustré. La présence de symboles palestiniens a suscité, nous dit le journal Le Monde, « l’indignation du groupe juif LGBT+ de France Beit Haverim, qui a dénoncé des “choix de communication irréfléchis” à même de déclencher “des débordements ou des actes d’hostilité” » (2).
Des communautés qui se détestent
La convergence des luttes des minorités autoproclamées victimes est intrinsèquement limitée dans ce qu’elle peut proposer. Comment est-il réellement possible d’intégrer positivement des luttes identitaires religieuses ou ethniques de communautés qui se détestent et se combattent ? Par ailleurs, les mouvements communautaristes sont en perpétuelle évolution, à l’image de l’acronyme LGBTQ+ destiné à additionner sans cesse de nouvelles causes, qui pourtant s’opposent souvent aux plus anciennes. Ainsi le mouvement Black Lives Matter critique les précédents militantismes de libération noirs, tandis que les mouvements féministes révolutionnaires ont donné naissance à de nouvelles formes d’identité (queers…) qui répugnent à admettre une quelconque fixité. À cela s’ajoutent les revendications raciales qui créent inévitablement un antagonisme entre les lesbiennes blanches et noires, ces dernières devant alors choisir entre la priorisation de la lutte sur un fondement racial ou sur un fondement sexuel, car dans les deux cas, bien sûr, elles sont dans le camp des dominées. L’intersectionnalité, c’est-à-dire la jonction des luttes, ne doit donc être entendue que de manière négative, les divers mouvements étant seulement unis par leur commune haine de l’idée de pouvoir, d’héritage du passé et de toute identité naturelle qu’elle soit…