Parce qu’ils n’ont pas de courage temporel Réaction d’un lecteur à l’éditorial de Philippe Maxence

Publié le 04 Mai 2018
Parce qu'ils n'ont pas de courage temporel  Réaction d'un lecteur à l'éditorial de Philippe Maxence L'Homme Nouveau

Dans le dernier numéro de L’Homme Nouveau (n°1662), Philippe Maxence revenait sur le discours du Président de la République au Collège des Bernardins et sur la situation politique des catholiques aujourd’hui. Un lecteur a réagi en proposant dix pistes de réflexion.

1. Oui, bien des catholiques, aujourd’hui encore plus qu’hier, manquent de courage, avant tout en matière religieuse ou spirituelle, et pas seulement en matière politique ou temporelle.

2. Ainsi, je suis de ceux à qui il arrive d’inciter les évêques à faire preuve de courage, et à rappeler fréquemment qu’il y a des différences de nature, considérables, et non dissimulables,

– entre la religion chrétienne et les religions non chrétiennes,

– entre la vérité et les erreurs, en matière religieuse,

– entre le catholicisme et les confessions chrétiennes non catholiques, 

– entre l’enseignement orthodoxe de l’Eglise catholique et les opinions ou positions hétérodoxes de clercs ou de fidèles catholiques. 

3. Mais compte tenu du peu de réponses et de résultats qu’obtiennent mes incitations au courage et à la franchise en matière religieuse, je suppose que, dans leur esprit, toute position catholique un tant soit peu au service de l’annonce, de la conversion, de la sainteté, de la vérité, et non, bien sûr, au service du « dialogue », du consensus, du suivisme, de « l’unité », est une position illégitime, car archaïque ou inadaptée, conservatrice ou traditionnelle, intransigeante ou intégriste, dépassée par l’évolution des mentalités ou déficiente en esprit du Concile, en esprit d’Assise, en esprit de l’Evangile ou en esprit de Tibhirine.

4. Cette diminution, voire cette disparition du courage et de la franchise, en matière religieuse, nous la devons à des théologiens et à des évêques qui ne tiennent pas particulièrement à ce que les catholiques et à ce que les non catholiques sachent et comprennent

– que la religion chrétienne est bien dépositaire de la plénitude de la révélation divine,

– que les religions non chrétiennes ne sont pas dépositaires de la plénitude de la révélation divine, (relisez donc et faites donc lire la déclaration Dominus Iesus (2000)).

– que les chrétiens catholiques ne sont pas « dispensés d’annonce », souvent nécessairement dissensuelle, de Jésus-Christ,

– que les croyants non chrétiens et les non croyants ne sont pas « dispensés de conversion », souvent nécessairement héroïque, vers Jésus-Christ,

– que le Concile Vatican II ou, en tout cas, l’après-Concile gaudium-et-spiste à la française, est un échec d’une ampleur et d’une portée sans précédent, à peu près depuis la réforme catholique du XVI° siècle, 

– qu’une grande partie du christianisme catholique contemporain, partisane du « dialogue » interreligieux, dans le modérantisme pusillanime, et du « discernement » évangélique, dans la miséricorde vers les périphéries, est manifestement en train de devenir une espèce de néo-catholicisme post-moderne inclusif, c’est-à-dire une espèce de frère cadet du néo-protestantisme post-moderne libéral. 

5. Je vous remercie de tout coeur pour toute prise en compte des quelques mots qui précèdent, mais par ailleurs, et non, bien sûr, « en même temps », je suis sans la moindre illusion, car je n’ignore pas que bien des catholiques sont devenus des schizophrènes, sur cette question de la diminution, voire de la disparition du courage et de la franchise, en matière religieuse : dans le meilleur des cas, ils reconnaissent cette situation en privé, mais se gardent bien de remédier à cette situation en public, sauf en matière morale, notamment en ce qui concerne l’eugénisme et l’euthanasie.

6. Qui aura le courage et la franchise de rappeler pour quelles raisons philosophiques et théologiques, mais aussi « pastorales » (comprenez : adogmatiques ad intra et consensualistes ad extra), nous en sommes arrivés à une telle diminution du courage et de la franchise, au sein de l’Eglise catholique ? Oui, vraiment, quel essayiste ou quel journaliste aura le courage et la franchise de rappeler quelles sont les origines intellectuelles et les conséquences relationnelles de ce qui est bien plus une transformation qu’une rénovation du catholicisme ?

7. Ce déclin du courage et de la franchise, au sein du catholicisme, fait partie du paysage depuis le début de l’avant-Concile sous Pie XII,

– non seulement à cause de l’influence de philosophies proches de celles de Kant, Hegel, Schleiermacher, Husserl, Scheler, Jaspers, Heidegger ou Lévinas, et de théologies proches de celles de Chenu, Congar, Rahner, Teilhard, Baum, Kung, Haring, ou Murray,

– mais aussi à cause d’une corruption, d’une distorsion, d’une perversion ou d’une subversion des relations entre la charité due à tous les hommes, y compris, évidemment, aux chrétiens non catholiques, aux croyants non chrétiens, aux non croyants, et la vérité due sur Dieu, ou la vérité due en ce qui concerne les choses de Dieu, c’est-à-dire en ce qui concerne les fondements et le contenu, les dimensions et la direction de la foi, de l’espérance, et de la charité, en tant que vertus surnaturelles et théologales, et non en tant que « valeurs chrétiennes » soi-disant compatibles ou conciliables avec l’évolution des mentalités et avec l’orientation de la moralité.

8. C’est pour cette raison que tant et tant de catholiques soumettent aujourd’hui la charité et la vérité dues aux chrétiens non catholiques, aux croyants non chrétiens, aux non croyants, à une espèce de « gentillesse », religieusement correcte, en présence des confessions chrétiennes non catholiques, des religions non chrétiennes, et de telle conception dominante de l’homme et du monde contemporains.

9. Mais il s’agit d’une « gentillesse » souvent incohérente, inconséquente, inconsistante, voire, parfois, insignifiante, de la part de catholiques, en général, et de clercs catholiques, en particulier, qui, par exemple, ne sont ni contre l’islamisation de la France, ni contre la conception libérale ou post-moderne de la liberté et de la vérité en matière religieuse, alors que l’islamisation de la France est incompatible avec le maintien en vigueur de la conception libérale ou post-moderne de la liberté et de la vérité en matière religieuse, partout où l’islam s’est déjà durablement et profondément implanté…     

10. Nous sommes aujourd’hui en présence de clercs qui ne veulent pas ou, en tout cas, qui veulent le moins possible s’exposer au risque de déplaire aux non catholiques, avant tout sur les questions relatives au croire humain en Dieu, et pas seulement sur celles relatives à l’agir humain en ce monde ; telle est la réalité de la situation, et je vous remercie de bien vouloir préciser ou rappeler fréquemment à vos lecteurs quelles sont les origines philosophiques et théologiques, mais aussi les conséquences doctrinales et pastorales, de cette situation.

Un lecteur, ni anti-conciliaire, ni archi-conciliaire, qui ne peut plus se taire, en présence de l’amollissement adogmatique voire immanentiste et de l’attiédissement oecuméniste voire unanimiste du catholicisme contemporain, cet amollissement et cet attiédissement, hier « conciliaires », aujourd’hui « évangéliques », sévissant avant tout en matière religieuse, au sein du regard, du discours et des actes irénistes ou lénifiants de bien des catholiques, en direction des confessions chrétiennes non catholiques et des religions non chrétiennes, mais aussi en direction de l’athéisme ou de l’incroyance.

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