La pause liturgique : Kyrie 9, Cum jubilo (Fêtes de la Sainte Vierge)

Publié le 25 Jan 2025
agnus dei sanctus rex génitor kyrie

Cum Jubilo, Fêtes de la Sainte Vierge : 

Commentaire musical du Kyrie 9

Kyrie 9 Partition kyrie

 

Voilà un beau Kyrie du 1er mode, daté du XIIe siècle. Il serait une reprise française du Kyrie 10 qui, lui, serait d’origine catalane, au XIe siècle. De fait les deux Kyrie se ressemblent, un peu à la manière des deux Kyrie de la messe XI.

Le schéma du Kyrie 9 est : aba, cdc, ede’.

La mélodie part du Ré, fondamentale du 1er mode, puis monte jusqu’au La, dominante de ce même mode, en faisant entendre le Fa et le Sol. La descente mélodique se fait par degrés conjoints, c’est-à-dire qu’on entend toutes les notes, y compris le Mi qui était absent de la montée. On a donc une première courbe presque parfaite, qui revient vers le Ré : un élan et une détente.

C’est désormais autour de cette corde Ré que va s’enrouler la mélodie, sur la syllabe finale de Kyrie et sur la première syllabe de eléison. Ce dernier mot réalise une seconde courbe, moins ample, moins régulière aussi puisqu’elle part du Do, touche le Ré, monte au Fa puis au Sol, et redescend par degrés conjoints jusqu’au Ré, cadence finale. On a donc clairement deux élans et deux retombées avec au milieu une petite ritournelle très chantante.

Le second Kyrie part du La grave puis rejoint le Ré, à partir duquel il retrouve la mélodie du Kyrie précédent. Ce second Kyrie est plus piano, plus doux.

Le troisième Kyrie reproduit à l’identique le tout premier. Il doit être chanté un peu plus fort.

Le premier Christe attaque directement sur le La, dominante du 1er mode. L’accent au levé de Christe doit être bien mis en valeur. Il y a plus de chaleur et d’élan sur ce mot qui, comme le eléison suivant, touche le Sib et privilégie le Sol (finale de la mélodie de Christe, et podatus d’accent de eléison). Le mot eléison s’achève sur une cadence en La, très expressive et tendue vers la suite.

Pourtant, la mélodie du second Chriiste revient vers le grave. Elle part du La, effectivement, mais au lieu de s’envoler, elle redescend de façon très belle, très douce vers le Ré, et surtout vers la formule des premier et troisième Kyrie. Seules les trois premières notes de ce Christe lui sont propres. Après le climacus La-Sol-Fa, on retrouve la formule du Kyrie, jusqu’à la fin de eléison.

Le troisième Christe reproduit à l’identique la mélodie du premier. Il doit être chanté avec une chaleur plus grande. Car cette fois, l’enthousiasme va jaillir de lui.

Le Kyrie suivant, en effet, part du La, mais s’envole aussitôt vers le Do aigu et même le Ré qui arrive au sommet de toute la pièce. On peut noter que cette vocalise commence comme celle du second Kyrie, mais un octave plus haut. L’accent de Kyrie est également pris au levé. La finale, quoique située sur le Ré elle aussi, est plus douce, et elle précède un belle vocalise qui ramène la mélodie sur le La. À partir de ce La, on a une variante de la mélodie des premiers et troisième Christe, avec l’emploi du Sib, et un eléison identique, qui aboutit à une cadence en La.

L’avant dernier Kyrie reproduit exactement la mélodie du second Christe.

Quant au dernier Kyrie, il reprend l’envolée de la septième invocation, se pose sur une cadence en La, redouble sa vocalise aérienne en la modifiant très légèrement (un seul Ré au lieu de deux avant le torculus Do-Ré-La), puis revient à la formule du second Christe et de l’avant dernier Kyrie, pour s’achever avec la formule, en tout répétée six fois, de eléison.

Dom Gajard commente : « Le mouvement général de ce Kyrie comme celui de l’Agnus Dei est alerte, mais un peu large (ni lent, ni lourd). Les Christe sont plus forts que les Kyrie qui précèdent et moins forts que ceux qui suivent. Dans les Kyrie, le premier est d’intensité moyenne, le deuxième plus doux, le troisième plus fort. »

La paix enveloppe ce chant qui convient si bien à la Sainte Vierge. Tout est serein, frais, enthousiaste aussi, mais d’une joie mesurée, calme, virginale.

 

>> à lire également : Fondation Raoul Follereau : « Notre mission va bien au-delà du traitement médical »

 

Un moine de Triors

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