L’Assemblée nationale a récemment étudié un projet de loi visant à instaurer l’uniforme dans les écoles. Occasion de mettre en parallèle soutane et blouse d’écolier. Différentes dans l’absolu, l’une et l’autre n’en détiennent pas moins quelques avantages communs…
L’uniforme à l’école ? Ses promoteurs – parmi lesquels la première dame de France – ne manquaient pas d’arguments pertinents : la lutte contre la tyrannie des marques, la facilitation des rapports entre les élèves, l’économie pour les familles les plus modestes, … Quelle ardeur pour retrouver la blouse noire de la « douce France » de Trenet et des photos de Robert Doisneau ! Et la « blouse » noire du curé, quel est son intérêt ? Voici quelques éléments de réponses.
« Il ne faut pas se fier aux apparences »
Eh oui ! Si l’uniforme empêche l’élève de rechercher un succès parce qu’il porte des habits à la mode, la soutane empêche le prêtre de se singulariser de ses confrères car en lui doit être reconnu avant tout le ministre, presque impersonnel, du Christ et de l’Eglise, quels que soient son origine sociale, l’état de fortune de sa famille ou encore ses appétits vestimentaires personnels. Et même si tel prêtre peut être renommé pour ses talents de prédicateur, sa pratique de l’ascèse ou ses aptitudes intellectuelles, son habit lui rappelle à lui, mais aussi aux autres, qu’il est d’abord l’homme de Jésus et que c’est Jésus qu’il doit manifester et non lui-même.
« Tout le monde à la même enseigne »
L’idée d’un uniforme dans les écoles apparaît souvent à nos contemporains comme contraignante pour les enfants qui ne peuvent plus choisir leur « look » voire même pour les mamans qui ne peuvent plus se faire plaisir vis-à-vis de leur petit qui se laisse encore faire ! L’expérience montre pourtant que si nombre d’élèves se moquent éperdument de porter l’habit que tout le monde porte et n’en souffrent pas, un nombre non négligeable montre une certaine fierté à porter leur uniforme.
Cela est vrai pour les ecclésiastiques encore aujourd’hui : quelle joie et même quel honneur de porter cette bonne vieille soutane que tant de saints prêtres ont portée. De plus, si les fidèles doivent prier pour les prêtres, n’est-ce pas pour qu’ils restent dignes de porter leur habit et d’être conformes à ce qu’ils représentent ? Et de fait, quel rappel quotidien et quelle protection chaque matin lorsque le prêtre l’enfile !
« L’habit ne fait pas le moine »
L’adage est certes bien connu et renferme, une leçon de sagesse populaire tout à fait pertinente : ce n’est parce que le moine porte une bure qu’il est un saint, un religieux probe et intègre. S’il s’agissait seulement du novice ! La question peut se décliner de multiples façons : de la robe du magistrat à la blouse de l’écolier, de l’uniforme du gendarme à la blouse du médecin. En aucun cas l’habit ne renseigne sur l’excellence de son porteur, bien que cependant il indique sa qualité, sa fonction, son état et cela n’est déjà pas si mal !
Qui de fait accepterait, au volant de sa voiture, d’obtempérer aux ordres d’un homme sans uniforme ou de se faire ausculter par un joyeux luron en tenue de plage ? La vérité est que si l’habit ne renseigne pas sur tout, il renseigne malgré tout … Ainsi l’habit ecclésiastique est-il a minima un renseignement, un signe visible qui indique à tout un chacun que cet homme, que cela fasse plaisir ou non, est un prêtre.
Tous les prêtres portant l’habit ecclésiastique, spécialement la soutane, peuvent témoigner de la force apostolique de sa bonne robe noire : des personnes qui vous interpellent dans les couloirs d’un hôpital à celles qui vous demandent une prière au détour d’une rue ; du premier germe de conversion pour l’un à votre passage, à peut-être l’agacement – mais qui sera la première pierre d’une réflexion, qui sait ! – pour l’autre. A ce titre, même une invective, une insulte ou encore l’ado qui demande où vous avez acheté votre déguisement de Matrix n’est pas forcément stérile : le bon Dieu écrit droit avec des lignes courbes, et parfois même très courbes !
« Où donc est la soutane où l’on reconnaissait avec respect l’homme de Dieu quand il passait ? » chantait Serge Lama avec raison. Oui, la soutane est bien ce signe de Dieu dans un monde de plus en plus sécularisé ! Ne serait-ce d’ailleurs pour cette raison précise qu’il lui arrive d’être décriée ?
« Uniforme » dites-vous ?
Eh bien oui, uniforme ! Ce qui donne une seule forme, une apparence unique pour témoigner de l’unique Seigneur ! Trop souvent le prêtre voudrait rechercher à imprimer son style, sa marque et de fil en aiguille accumuler pour lui-même. Bien que les dons, les charismes soient divers et légitimes, la soutane marque – ou marquait – une uniformisation salutaire faisant correspondre les prêtres à rien de moins que la première marque de l’Eglise si on se réfère au Credo : une, sainte, catholique et apostolique.
Alors, bien plus qu’un hors-d’œuvre dévoré avant les « quelques poules faisanes venues du Périgord » évoquées dans la chanson « Le dernier repas » de Jacques Brel, l’habit ecclésiastique a encore – et plus que jamais – toute sa place aujourd’hui. Espérons cependant que la soutane ne subira pas le même sort que le projet de loi sur l’uniforme scolaire à l’Assemblée nationale !
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