Quadragesimo anno (V) : Le Capital et le Travail (I)

Publié le 15 Mar 2023
quadragesimo anno

Si dans Quadragesimo anno, Pie XI rappelle la doctrine catholique et de droit naturel concernant la propriété privée, il aborde aussi de front la question des liens entre le capital et le travail.   Pourquoi la question du lien entre capital et travail se pose-t-elle ? Publiée en 1931, l’encyclique Quadragesimo anno aborde de front la question économique et sociale telle qu’elle se présente à l’époque, notamment aux lendemains de la crise financière de 1929. Pour beaucoup, la situation n’a pas énormément changé depuis le XIXe siècle. D’un côté, il y a les détenteurs du capital, propriétaires, en nombre limité, des biens et des infrastructures et, de l’autre, la masse des travailleurs apportant leurs forces et leurs compétences. Cette répartition ne va pas sans poser des problèmes ni de graves injustices. Pie XI constate que la séparation radicale du capital et du travail a entraîné des abus. Du côté du capital, celui-ci, écrit-il, réclame « pour lui la totalité du produit et du bénéfice, laissant à peine à la classe des travailleurs de quoi refaire ses forces et se perpétuer. Une loi économique inéluctable, assurait-on, voulait que tout le capital s’accumulât entre les mains des riches ; la même loi condamnait les ouvriers à traîner la plus précaire des existences dans un perpétuel dénuement. » Du côté des travailleurs, et des « intellectuels » qui les soutiennent, une autre prétention existe, également dénoncée par le pape : « tout le produit et tout le revenu, déduction faite de ce qu’exigent l’amortissement et la reconstitution du capital, appartiennent de plein droit aux travailleurs. » C’est à ces deux erreurs symétriques que l’encyclique entend, notamment, répondre. Mais Quadragesimo anno ne s’était-elle pas donnée pour but la restauration de l’ordre social, une ambition beaucoup plus vaste que la question du capital et du travail ? Certes, mais Pie XI estime alors que pour « restaurer l’ordre social » dans son ensemble, il faut assainir l’économie. Celle-ci se trouve menacée par deux tentations, celle de l’individualisme porté par le libéralisme économique, sous le couvert d’une compréhension stricte du droit de propriété, et celle du totalitarisme sous couvert d’une juste répartition qui remet toute la vie économique entre les mains de l’État. En bref, la tentation socialiste. À tous, Pie XI entend rappeler qu’ils sont les membres d’un même corps social, et non pas le centre exclusif d’intérêt et d’action économique. Là où Rerum Novarum de Léon XII avait insisté sur la dignité…

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