Cet été : Jean Racine, un dramaturge chrétien
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Cet été : Jean Racine, un dramaturge chrétien
Malgré ses jeunes années passées aux petites écoles de Port-Royal, Jean Racine s’est voulu le porte-parole des auteurs attaqués par Pierre Nicole. Peut-être l’occasion pour le jeune dramaturge d’alors de regretter publiquement l’absence de soutien de ses anciens maîtres… et de défendre le genre théâtral auquel il a consacré sa vie. Entretien avec Laurent Thirouin
| Qu’est-ce qu’on a appelé la querelle « des Imaginaires », qui a secoué le monde des lettres en 1666 ?
Laurent Thirouin : Tout démarre d’une publication, cette année-là, par un certain Desmarets de Saint-Sorlin, d’une Réponse à l’insolente apologie des religieuses de Port-Royal. Cet adversaire farouche de l’abbaye, peu connu aujourd’hui, y attaque violemment les cisterciennes de la vallée de Chevreuse, coupables à ses yeux d’épouser la cause de Jansénius. Pierre Nicole, l’un des principaux écrivains et défenseurs de Port-Royal, voulut répondre à cet affront. Il avait déjà publié une série de dix lettres ouvertes, Les Imaginaires, ou Lettres sur l’hérésie imaginaire (parce que les jansénistes pensent que l’hérésie dont on les accuse est une hérésie imaginaire). Il décide de leur adjoindre huit nouvelles lettres, Les Visionnaires ou seconde partie des Lettres sur l’hérésie imaginaire. Le titre de « Visionnaires » est une attaque directe contre Desmarets de Saint-Sorlin, auteur à l’époque de Richelieu d’une comédie restée célèbre et précisément intitulée Les Visionnaires (c’est-à-dire, dans la langue classique, les « délirants »). La comédie, que Molière a plusieurs fois représentée sur son théâtre, est une galerie de fous, victimes de visions de toute sorte. L’auteur a depuis longtemps abandonné le théâtre et se répand en écrits mystiques, eux-mêmes plus ou moins délirants. Bel adversaire pour Port-Royal ! Pour le déconsidérer, Pierre Nicole rappelle accessoirement son ancienne profession, à l’époque de Richelieu, et sa carrière qui devrait suffire à lui ôter toute autorité. « Un faiseur de romans et un poète de théâtre est un empoisonneur public, non des corps, mais des âmes des fidèles », tranche sèchement le moraliste. Autrement dit, Desmarets de Saint-Sorlin, venu prétendument donner des leçons de…
