Contemporains, condisciples de l’Université de Paris, issus d’ordres concurrents mais prêcheurs l’un et l’autre, philosophes et théologiens à l’immense postérité, saint Thomas et saint Bonaventure étonnent par la similarité de leurs destins qui illuminèrent le XIIIe siècle et n’ont pas fini de nous éclairer.
Au point de vue surnaturel, le XIIIe siècle paraît configuré tout entier aux effigies spirituelles de deux hommes nés au XIIe siècle, deux saints qui furent, comme tous les saints, tout à la fois infiniment accordés et profondément singuliers. Il s’agit bien sûr de saint François d’Assise, mort en 1226, et de saint Dominique, mort en 1221. Le siècle s’ouvrait par un battement immense de ces deux ailes de l’Église, et qui soudain emplissait tout le ciel de l’Occident. L’air en fut tout vibrant de grâces pour l’éternité et sur le monde alors retomba, partout emportée par le vent de l’Esprit, la poussière d’or de ces deux ordres mendiants que sont les Mineurs et les Prêcheurs.
Si un saint est toujours une manière de parole vive, un peu plus fortement prononcée que les autres, s’il est toujours une sorte de chant un peu plus sonore que les autres, une voix qui soudain, dans le concert de l’humanité convoquée tout entière à la vie et la vision de Dieu, se détache de l’ensemble toujours un peu confus et dissonant et s’élève alors, précise, exacte, puissante, limpide, raisonnable et résonnante ; si un saint est toujours une telle réponse à la vocation surnaturelle de l’homme, à cet appel par quoi Dieu veut attirer librement à lui tous les hommes, alors les ordres éventuellement fondés par eux sont comme les échos allant se répercuter contre les coins du monde, et jusqu’à la fin des temps se répétant sans monotonie, s’augmentant de leurs propres répercussions, et petit à petit répandant jusqu’aux confins de la terre ce concert unanime parmi les cacophonies de l’histoire qui a nom l’Église catholique, qui est le cœur du monde et son chœur aussi.
Le souvenir surnaturel des saints François et…