DOSSIER | « Les catholiques et le sport : des patronages aux Jeux olympiques » 3/3
La comparaison entre entraînement sportif et ascèse chrétienne est faite par saint Paul lui-même et certains sportifs ont pu s’approcher de la sainteté. La métaphore est belle, mais peut-on tout à la fois grandir physiquement et spirituellement.
Citius, Altius, Fortius – « Plus vite, plus haut, plus fort » : la devise des Jeux olympiques remonte à la refondation de Pierre de Coubertin, en 1896. Elle n’est pourtant pas l’œuvre du sportif baron, qui l’avait empruntée à l’un de ses amis, le R. P. Henri Didon, dominicain, avec lequel il fonda la première association de rencontres sportives scolaires. Quelques années plus tard, Didon célébrera à Athènes la messe d’ouverture des premiers Jeux de l’ère contemporaine. « Plus vite, plus haut, plus fort » : les trois adjectifs rassemblés par le religieux ne désignaient pas d’abord la diversité des disciplines olympiques, mais les différents domaines d’une éducation intégrale : intellectuel, spirituel et corporel. Développement du corps, de l’intelligence et de l’âme peuvent-ils aller de pair ? La professionnalisation et la marchandisation contemporaines du sport semblent s’y opposer.
Le premier sportif canonisé ?
Et pourtant, certains sportifs montrèrent un réel exemple de sainteté [1]. Parmi eux on peut citer Gino Bartali, dit « Gino le Pieux », vainqueur de deux Tours de France à dix ans d’intervalle (1938 et 1948), de trois Giro… Né dans une famille modeste, réparateur de bicyclettes, il économise pour acheter son premier vélo de course. Gravissant les échelons du cyclisme amateur, il devient professionnel et se fait rapidement remarquer, brillant lors de son premier Milan-San Remo, malgré un dérailleur bloqué, puis remportant une première étape sur le Giro 1935. Dès 1936, il est vainqueur au classement général. Mais quelques jours après ce premier succès, grisant pour le jeune coureur, son frère Giulio, coureur amateur, est victime d’un accident mortel. Gino hésite alors à arrêter le cyclisme, qu’il reprend finalement à la fin de la saison, pour gagner l’année suivante un second Giro, puis en 1938 son premier Tour de France. Cet événement dramatique l’avait pourtant changé intérieurement.
« Gino le Pieux »
Sa participation au Tour de France 1937 aurait dû être pour l’Italie mussolinienne un argument de propagande : or ce ne sont pas les prouesses de Gino le Fasciste que décrira la presse sportive de l’Hexagone, mais celles de…