Le Trésor de la Sainte Messe : Une publication hautement opportune

Publié le 06 Nov 2023
messe en latin traditionnel
Dans la lignée des célèbres dom Guéranger et dom Gaspar Lefebvre, Via Romana fait paraître un guide de la messe traditionnelle publié à l’origine par une petite maison d’édition américaine. Particulièrement bienvenu et même indispensable en ces temps où la messe résiste à toutes les attaques et continue d’attirer et de convertir, cet ouvrage hautement pédagogique propose une explication très exhaustive d’un rite qui met en valeur le mystère du sacrifice du Christ.

 

Le Trésor de la Sainte Messe. Guide complet de la messe en latin met en évidence le souci apostolique et la compétence pédagogiques de nos amis américains. St. Augustine Academy Press qui l’a édité est une maison installée non loin de Chicago, qui veut être « un petit apostolat familial ». Lisa Bergman, diplômée d’architecture, mère de six enfants, réalisatrice de cet ouvrage, en est le pilier. 

Elle se consacre essentiellement à la réédition d’ouvrages de littérature catholique devenus introuvables, spécialement des œuvres de la mère Mary Loyola, une religieuse qui s’était vouée à la production d’une œuvre littéraire pour les enfants et la jeunesse de type « Apostolat de la prière », dont le livre le plus connu est un très beau conte moral et spirituel : Le Roi de la Cité merveilleuse. St. Augustine Academy Press réalise ainsi des livres d’Histoire sainte, de catéchismes, des vies de saints.

 

L’univers de dom Lefevre

Avec Le Trésor de la Sainte Messe. Guide complet de la messe en latin, on est replongé dans l’univers esthétique et pédagogique de dom Gaspar Lefebvre (1880-1966), bénédictin de l’abbaye Saint-André-lez-Bruges – un assez proche parent de Marcel Lefebvre –, fondateur dans cette abbaye d’une maison d’édition dont l’appellation, « L’Apostolat liturgique », exprime bien le projet. Dom Lefebvre publia entre autres un Cours de liturgie pratique (1922).

Mais il est surtout connu par son célèbre Missel quotidien et vespéral romain, illustré par les gravures caractéristiques de l’artiste belge René de Cramer, dont on retrouve l’inspiration dans certaines illustrations de l’ouvrage de Lisa Bergman. Le Dom Lefebvre, avec ses copieuses explications liturgiques et spirituelles pour chaque dimanche et chaque fête de l’année, était d’une certaine manière la continuation de la très célèbre Année liturgique de dom Prosper Guéranger.

Ce Missel quotidien et vespéral eut un immense et durable succès, avec plus de 80 éditions en français, anglais, espagnol, polonais, italien, portugais. On peut le considérer comme un des livres les plus importants de la vie de l’Église catholique dans la première moitié du XXe siècle. Il représente la part traditionnelle et monastique du Mouvement liturgique, laquelle cultivait une intelligente participation des fidèles à la liturgie par la meilleure compréhension possible des cérémonies, leur assistance non seulement à la messe chantée en grégorien mais aussi au chant des vêpres dominicales, et la récitation des complies comme prière du soir.

C’est dans cette ligne d’apostolat liturgique que se placent St. Augustine Academy Press et Lisa Bergman avec la publication du présent ouvrage, mais dans un tout autre contexte, celui du catholicisme sinistré, spécialement du point de vue du culte divin, du début du XXIe siècle.

La volonté pédagogique est cependant la même : il s’agit de faire connaître et comprendre en ses diverses parties, par des explications, des schémas, des gravures, et aussi des photos, le sacrifice de la messe, renouvellement du sacrifice de la Croix où le Christ est à la fois Prêtre et Victime, l’emboîtement de ses rites sacrés, son mobilier, ses objets et vases, son vestiaire, ses acteurs, ses temps liturgiques. Ce livre répond aussi très simplement à des questions récurrentes comme : « Pourquoi la messe est-elle célébrée en latin ? », « Pourquoi le prêtre n’est-il pas face à l’assemblée ? « Pourquoi est-ce silencieux ? »

 

La structure de la messe, sa musique…

Les explications s’adressent très concrètement à qui ne sait rien de la liturgie ou, ce qui revient à peu près au même, qui n’en connaît que la forme nouvelle.

En une petite vingtaine de pages préliminaires, cet Assimil fait comprendre la structure de la messe, sa musique et ses chants, son calendrier (en précisant en quoi il est différent du calendrier « ordinaire »), les diverses manières de la célébrer, messe chantée parfois solennelle et messe basse (la messe pontificale, réduction de la messe papale, étalon de toute messe, est peu évoquée parce que les fidèles ont bien moins d’occasions d’y assister), les « côtés de l’autel », épître et évangile, les rubriques (les indications sur les cérémonies à accomplir en lettres rouges, rubræ).

On pourra regretter que les explications symboliques ne soient pas plus amples, mais Lisa Bergman a le souci et l’art de donner en tout des repères simples et clairs. Les textes du commun sont ensuite rapportés en latin et (pour nous) en français, chaque partie étant introduite, chaque cérémonie brièvement décrite ou donnée à voir par des schémas ou des photos. 

 

Vitalité du rite tradionnel

Et puis, il faut le dire, cet ouvrage témoigne hautement de la visibilité et de la vitalité du rite traditionnel. Il répond en effet à une demande importante : les jeunes que cette liturgie traditionnelle fascine, les chrétiens qu’elle a convertis, ceux qui y viennent du rite nouveau qui les laisse insatisfaits, tous ont besoin d’un instrument facile pour mieux y accéder.

Il fait en somme saisir qu’on ne peut comprendre, puisqu’il fait approcher le mieux possible du mystère. Non pas l’approcher comme le fait la liturgie nouvelle qui fait toucher, comme la communion qu’on reçoit dans la main, le sacré qu’elle profane, c’est-à-dire qu’elle rend le plus ouvert possible au profane, mais au contraire en infusant le sentiment de transcendance du surnaturel, aux canaux cultuels duquel on s’abreuve, en soulignant dans les rites et les paroles cette condescendance divine qui s’abaisse vers les âmes, tout en restant l’indicible et l’incompréhensible.

Il s’agit d’entrer dans le mystère et de l’adorer, d’être projeté en lui, tout en ressentant son infinie altérité, ce qui constitue la trame d’une vraie participation.

Les attaques que subissent aujourd’hui la liturgie traditionnelle et ceux qui en bénéficient visent clairement à l’éradiquer et ne s’en cachent pas. Le fait que cette liturgie produise des vocations au sein d’une Église qui les cherche désespérément, qu’elle réunisse des assemblées nombreuses avec une foule de jeunes et de familles n’arrête pas la violence des agressions. Cela semble au contraire l’exaspérer, en quoi il est difficile de voir chez ceux qui les mènent les motions du bon esprit.

Paradoxalement, ces attaques violentes mettent en lumière l’importance de cette liturgie, dont on n’avait cessé de répéter jusque-là qu’elle était résiduelle, minoritaire. C’est que, malgré soixante ans de réforme, non seulement il n’a pas été possible de la faire disparaître : il s’est au contraire avéré qu’elle continuait de croître et de se répandre. 

 

Une réponse aux attaques

Le présent Trésor de la Sainte Messe (Treasure and Tradition. The Ultimate Guide to the Latin Mass dans l’édition américaine) est une réponse concrète à ces attaques : l’éducation liturgique traditionnelle se poursuit imperturbablement, cependant que documents et lettres solennelles s’efforcent en vain d’inviter à mieux connaître (enfin !) la liturgie nouvelle, censément plus riche, plus participative, etc., mais qui se célèbre dans toujours moins d’églises, toujours plus vides.

Ce bel instrument qu’est Trésor de la Sainte Messe. Le guide complet de la messe en latin, richement illustré, soigneusement édité, va ainsi participer à cette œuvre de redressement liturgique et missionnaire qu’exige l’état de notre Mère l’Église, pour qu’advienne enfin une vraie réforme de l’Église, s’appuyant, comme toutes les réformes du passé, sur le trésor cultuel qui lui a été transmis comme de main en main, expression très pure de la foi de Rome.

 


Le Trésor de la Sainte Messe. Guide complet de la messe en latin, Lisa Bergman, Via Romana, 94 p., 23 €.

messe tradionnel

 

>> à lire également : Toussaint (3/3) : Comment aider nos enfants à devenir des saints ?

 

Abbé Claude Barthe +

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