Trop jeune pour conduire, assez vieux pour décider de sa mort

Publié le 14 Fév 2014
Trop jeune pour conduire, assez vieux pour décider de sa mort L'Homme Nouveau

En signe de deuil, certains défenseurs de la vie affichaient un drapeau belge noué par un ruban noir. Ils ont également organisé des journées de jeûne et de prière à la demande de leurs pasteurs. Mais après les Pays-Bas, la Belgique est désormais le deuxième pays à avoir légalisé l’euthanasie pour les mineurs, ce 13 février 2014. Contrairement à leur voisins du Nord qui ont fixé à 12 ans l’âge minimum pour subir une euthanasie, les Belges ont pour seul critère la « capacité de discernement » du patient. Cette décision, lourde de conséquences, a pourtant été votée assez rapidement puisque le processus avait commencé le 27 octobre, avec le vote du projet à 13 voix contre 4 par la Commission des affaires sociales et de la justice du Sénat belge. Le même Sénat l’adoptait ensuite à 50 voix contre 17 le 12 décembre 2013.

L’inquiétude des experts

Jusqu’à la veille de l’adoption définitive du projet de loi, des Veilleurs se tenaient devant la Chambre des représentants, debout en silence malgré la pluie, pour montrer leur opposition à cette avancée supplémentaire de la culture de mort. Les 10, 11 et 12 février, un Congrès international de soins palliatifs pédiatriques réunissait à Mumbai en Inde 250 experts en soins palliatifs venus de 35 pays. Ils ont lancé un appel pressant au gouvernement belge pour réclamer, plutôt que l’euthanasie, le développement des soins palliatifs pour les enfants en fin de vie. Les experts ont précisé dans leurs conclusions que « l’euthanasie ne fait pas partie de la thérapie palliative pédiatrique et ne constitue pas une alternative ». De fait, une telle loi bouleverse profondément le sens même de la médecine qui, plutôt que de favoriser la recherche, peut désormais donner la mort quand elle ne peut plus contrer la maladie.

Leurs inquiétudes, comme celles des quelques 200 pédiatres qui avaient signé une déclaration pour s’opposer au projet de loi, n’ont pas été entendues. « Un jeune peut penser en adulte après ses 18 ans. On le voit aussi dans d’autres domaines, comme dans l’octroi d’une assurance voiture. Même dans les dossiers judiciaires, l’impulsivité d’un mineur est utilisée pour adoucir la peine. Mais pour l’euthanasie, cette impulsivité ne serait pas un problème », explique ainsi le professeur Stefaan Van Gool. Car c’est bien là l’inquiétude de ces experts : comment peut-on mesurer la capacité de jeunes enfants à décider de leur mort ?

Qui jugera les juges?

Car la loi prévoit justement que la demande d’euthanasie doit venir de l’enfant, avec accord des parents et enquête d’une équipe médicale sur la capacité du patient à mesurer ce qu’est la mort. L’enfant devra par ailleurs être en phase terminale d’une maladie incurable dont les souffrances ne peuvent être apaisées pour pouvoir demander l’euthanasie.

Certains médecins ont ainsi la prétention de pouvoir juger de la compréhension de la mort que peut avoir autrui… Mais qui jugera de l’honnêteté du jugement du corps médical ou de la pureté d’intention des parents lorsqu’ils donneront leur accord pour que l’on tue leur enfant ?  Dès lors que l’interdit de tuer une personne innocente est franchi, il n’est plus de limite qui tienne. A n’en pas douter, les promoteurs de l’euthanasie en France verront dans la loi belge un exemple à suivre pour le débat qui doit s’ouvrir dans les semaines qui viennent sur la fin de vie.

Ce contenu pourrait vous intéresser

Société

L’action politique (4/5) | Les devoirs de justice générale en situation d’illégitimité du pouvoir

DOSSIER « Réflexions sur l’action politique » | La cité colonisée par les intérêts particuliers, le bien commun oublié, le mal-être et les difficultés partout : que faire ? La claire vision de la situation et la morale de l’action imposent d’agir et, dans la lignée d’Aristote et de saint Thomas d’Aquin, deux ouvrages contemporains proposent des moyens immédiats pour chacun de faire sa part dans la restauration de l’ordre.

+

action politique
SociétéÉducation

Les écoles hors contrat en plein essor malgré les contraintes

Portées par des parents, des réseaux confessionnels ou sociaux et désormais des acteurs privés, les écoles hors contrat connaissent une croissance régulière. Professionnalisation, diversification des profils et motivations contrastées des familles dessinent les contours d’un secteur de plus en plus structuré. Entretien avec Augustin Yvan, responsable du développement à la Fondation pour l’école.

+

école hors contrat