Cet été : La tunique d'Argenteuil témoin de la Passion
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Cet été : La tunique d'Argenteuil témoin de la Passion
L’Église catholique a traduit dans sa liturgie la vénération que tout chrétien doit aux reliques. Si l’on a peu l’occasion d’entendre ces pièces de grégorien, il est précieux de revenir à ces textes portés par la foi dans l’espérance de la Résurrection.
Il est une fête quelque peu oubliée, datant du XIXe siècle et célébrée autrefois le 5 novembre : la fête des Saintes-Reliques, accompagnée parfois de la précision, « Quæ in ecclésiis diœcésis adservántur », soit « qui sont conservées dans le diocèse ».
Ce n’est pas par hasard que cette fête se célèbre après le jour de la Toussaint, fête des saintes âmes qui sont entrées au Ciel, car la fête du 5 novembre honore les saintes reliques de leur corps jusqu’au moment de la résurrection glorieuse. Il suffit de lire l’oraison « Auge in nobis Dómine, resurrectiónis fidem, qui in Sanctórum tuórum relíquiis mirabília operáris » : « Augmentez en nous, Seigneur, la foi en la résurrection, Vous qui opérez des merveilles par les reliques de vos saints. »
Des textes anciens
L’introït de cette fête Multæ tribulatiónes est pris de la fête des saints Jean et Paul, martyrs, du 26 juin (Missel de 1962) et du commun de plusieurs martyrs, hors le temps pascal (Graduel de 1974). Le graduel Exsultábunt provient de l’ancienne vigile de la Toussaint et on le trouve dans le Graduale romanum de 1974, à la messe du commun des martyrs parmi l’un des six graduels proposés.
Le très bel Alléluia Justi epuléntur a été tiré quant à lui de la deuxième messe de plusieurs martyrs (1962) et la première messe fournit le texte et la partition de l’offertoire Mirábilis Deus. Enfin, l’antienne de communion Gaudéte justi est issue de cette même messe, mais au temps pascal (1962 et 1974). Toutes ces pièces font partie du fonds grégorien, mais sont absentes du Nouveau Graduel édité par Solesmes en 1985.
Unis à la victime du Calvaire
Dès les premiers temps de l’Église, les saints mystères furent célébrés sur les tombeaux des martyrs, dans les catacombes, afin de montrer que ces saints avaient mêlé leur sang à celui de la victime du Calvaire. La première antienne des vêpres du commun de plusieurs martyrs nous le rappelle. « Isti sunt Sancti qui testaménto Dei, sua córpora tradidérunt, et in sánguine Agni lavérunt stolas suas. (Voici les saints qui, pour rendre témoignage à Dieu, ont lavé leurs robes dans le sang de l’Agneau.) »
À Rome furent construits des temples majestueux, vastes reliquaires abritant la sépulture des martyrs célèbres. Rien ne surpassait le zèle des chrétiens à se procurer le corps des martyrs, à donner à ces précieuses « reliques » une sépulture de choix, à célébrer leur natalitía, le jour anniversaire de leur mort ou « naissance » au Ciel.
Le concile de Trente (sess. XXV) a rappelé combien les corps de ces saints doivent être honorés par les fidèles. Les « restes » ou reliquiae de ceux qui avaient « confessé » leur foi étaient déposés sous le maître-autel ou confession (la confession de la basilique Saint-Pierre de Rome abrite le tombeau du saint). De là, l’usage de la translation des reliques de ces martyrs qui constituent l’une des parties essentielles de l’émouvante cérémonie de la dédicace d’une église.
Quant aux grâces de protection que l’Église attend des reliques pour ceux qui les honorent, elle les détaille dans sa bénédiction des reliquaires au pontifical romain ou au rituel : « Que tous ceux qui auront vénéré ces reliques pour le réconfort de leur âme, obtiennent de ces saints le pardon de tous leurs péchés et que par votre aide ils soient protégés de toutes leurs adversités. »
Le devoir du culte des saintes reliques
Que l’on nous permette de citer le grand hagiographe que fut l’abbé Léon Jaud, qui rédigea, à la fin du XIXe siècle (1884), un extraordinaire ouvrage intitulé Vie des saints pour tous les jours de l’année, qui connut de nombreuses rééditions (il place d’ailleurs étonnamment la fête des Saintes-Reliques au 8 novembre) :
« Le culte des saintes reliques n’est pas seulement permis, mais ordonné ; il n’est pas seulement un droit, mais un devoir. Remarquons-le bien, le culte des reliques diffère des pratiques païennes parce qu’il est surnaturel ; nous n’honorons pas les restes des saints pour des motifs puisés dans la nature ; mais pour des motifs puisés dans la foi. Qu’on honore la mémoire et les restes des grands hommes dignes de ce nom, c’est justice ; mais qu’on honore la mémoire et les restes des saints, c’est plus que justice, c’est œuvre de religion, et l’objet final du culte des saintes reliques, c’est Dieu sanctifiant les saints, c’est Jésus-Christ, dont les saints sont les membres.
« Ce culte est si légitime, que Dieu, souvent ordinairement même, glorifie lui-même les reliques de ses saints par des parfums célestes, par d’autres merveilleux privilèges, par d’innombrables miracles.
« Vénérons donc avec respect, dévotion, confiance, ces reliques précieuses, qui furent autrefois animées par de grandes âmes, ont été les instruments de belles et saintes œuvres, d’étonnantes vertus, et seront un jour honorées d’une brillante et immortelle gloire. Aimons les pèlerinages aux tombeaux des saints, célébrons religieusement la fête des Saintes-Reliques, qui suit avec tant d’à-propos la fête de la Toussaint, fête des saintes âmes qui sont au Ciel. »
La séquence de la messe de la sainte Tunique
La sainte Tunique d’Argenteuil eut sa propre messe votive. Elle fit son entrée dans le Missale Parisiensis ecclesiæ de l’an 1505 sous l’épiscopat d’Étienne Poncher, avant de disparaître dans l’édition de 1602 d’Henry de Gondy. Elle resta néanmoins en usage dans le monastère d’Argenteuil qui abritait la précieuse relique. On y peut lire ces mots, tirés de la séquence :
« À ton Sauveur, peuple fidèle / Chante une louange éternelle / Pour son vêtement précieux. / Tous les démons tu pourrais vaincre / Si la foi te pouvait convaincre / Que c’est l’habit du Roi des Cieux. / C’est la Tunique sans couture / Que la Vierge, Mère très pure, / A faite de ses propres mains / Son Fils en couvrit sa chair tendre / Jusqu’au jour qu’on lui fit répandre / Le sang qui sauva les humains. »
Musique recomposée & adaptée pour l’ostension de 2016 : Henri Adam de Villiers
© Schola Sainte-Cécile
Télécharger le livret ici.
Patrick Banken
Président d’« Una Voce France »
et animateur de « Chant grégorien, prière chantée », sur Radio Courtoisie.
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