Un nouveau paradigme en théologie morale ?

Publié le 02 Juin 2023
moral

Paul VI, signant Humanae Vitae

Cinquante-cinq ans après Humanae Vitae, dans un contexte de déchristianisation, au sein même des institutions de l’Église destinées à défendre et expliciter son magistère moral, certaines autorités s’essaient à le relativiser en détournant la notion de discernement.

La publication récente de deux livres (1) donne l’occasion de mesurer que la contestation du magistère moral sur le mariage et la famille devient désormais quasi institutionnelle. En effet, le fer de lance de cette remise en cause, feutrée mais non moins radicale, n’est autre que les deux instances créées par saint Jean-Paul II pour servir la promotion de ce même magistère, à savoir l’Académie pour la vie et l’Institut pontifical Jean-Paul II pour le mariage et la famille. Cette remise en cause n’est pas frontale. Il ne s’agit pas de nier la légitimité par exemple d’Humanae Vitae sur la contraception ou de Donum Vitae sur la PMA. Il s’agit de les interpréter à partir d’un nouveau paradigme qui les vide de leur normativité morale. Qu’est-ce à dire ? Quels sont les présupposés et les enjeux de cette nouvelle perspective ? Notre hypothèse est que cette nouvelle approche est pratiquement révolutionnaire. On pourrait objecter qu’elle ne fait que valider théoriquement ce qui existe déjà massivement sur le terrain pastoral, et pour cause, puisque ni Humanae Vitae ni la théologie du corps de saint Jean-Paul II ni Veritatis Splendor n’ont été l’objet d’un vrai travail d’appropriation par nombre de nos pasteurs. Mais la phase actuelle, ouverte par les deux synodes sur la famille, est plus dangereuse car elle s’appuie sur l’échec pastoral de la réception du magistère moral pour légitimer une pastorale qui s’émancipe en pratique largement de ce même magistère. Au lieu de réfléchir aux causes, de natures diverses, de cet échec, elle procède à une fuite en avant en décidant de lire les textes magistériels à partir de l’expérience des fidèles, eux-mêmes largement conditionnés par le contexte culturel et moral, subjectiviste et relativiste. On peut identifier le point de départ de cette offensive institutionnelle dans le fameux discours que le cardinal Kasper a donné lors du consistoire de février 2014 pour lancer la réflexion synodale sur la famille. Le cardinal allemand en appelle à un nouveau paradigme pour aborder les questions morales sensibles, notamment sur la régulation des naissances et l’accès aux sacrements des divorcés et remariés civilement. Cette notion de paradigme a été…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Thibaud Collin

Ce contenu pourrait vous intéresser

À la uneÉglise

Infaillibilité et synodalité

Dans sa catéchèse du 27 septembre, le pape Léon XIV a tenu ces propos : « Les petits ont de l’intuition. Ils ont un sensus fidei, qui est comme un “sixième sens” des personnes simples pour les choses de Dieu. Dieu est simple et se révèle aux simples. Voilà pourquoi il y a une infaillibilité de la foi du Peuple de Dieu, dont l’infaillibilité du Pape est l’expression [c’est nous qui soulignons] et le service. » Quelle portée donner à ces paroles ? Cet article paraît simultanément dans L’Homme Nouveau et sur le site Res Novæ.

+

infaillibilité
ÉgliseLiturgie

La pause liturgique : Alléluia Venite ad me (Toussaint)

L'Alléluia de la messe de la Toussaint nous présente une mélodie à la fois solide et élancée qui se structure autour de quelques notes fondamentales : le Sol et le Do, respectivement tonique et dominante du 8ᵉ mode, souvent mises en relation par l'intervalle de quarte. De l'introït à la communion, chaque pièce est admirable, et l'ensemble fournit un enseignement de grande valeur sur le thème de la sainteté.

+

communion kyrie introït séquence pâques ascension glória alléluia
Église

Missionnaire en 2025 : « L’évangélisation reste un acte humain » (2/5)

Missionnaire en 2025 : « L’évangélisation reste un acte humain ». À l’approche du Congrès Mission (7-8-9 novembre), L’Homme Nouveau propose une série d’entretiens avec des acteurs engagés dans l’annonce de la foi. Dans l’audiovisuel, Amaru Cazenave, fondateur de Revival Productions, rappelle que l’image ne remplace pas la rencontre.

+

AMARU PROFIL messe
Église

Bruno Guillot : Du salafisme à la foi catholique

Comment un adolescent mal dans sa peau a-t-il pu être happé par une idéologie totalement étrangère à sa culture? C’est ce que dévoile l’ouvrage autobiographique Adieu Souleyman dont le sous-titre, Itinéraire d’un imam salafiste, annonce le contenu. Bruno Guillot veut témoigner de l’étonnante facilité d’entrer dans l’islam, mais de l’extrême difficulté d’en sortir. Entretien.

+

Bruno Guillot