Auguste Comte et le positivisme

Publié le 09 Oct 2024
auguste comte

Auguste Comte (1798-1857) prône la naissance d’une nouvelle religion, celle de l’Humanité.

Bénéficiant d’une grande bienveillance dans certains milieux catholiques, la philosophie d’Auguste Comte est-elle réellement anti-révolutionnaire ? Un retour sur le positivisme permet de saisir l’intérêt de cette doctrine et de comprendre comment son matérialisme l’empêche d’embrasser toute la nature de l’homme et de la société en ne se penchant pas sur leurs fins.

  Le positivisme a souvent bénéficié dans le camp contre-révolutionnaire et catholique d’un coefficient de sympathie, dont la cause réside dans l’influence qu’a exercée la philosophie d’Auguste Comte (1798-1857) dans la critique des Lumières. Il fut même considéré comme l’un des principaux adversaires intellectuels des « principes immortels », c’est-à-dire de l’idéalisme révolutionnaire, fournissant des outils méthodologiques repris sans inventaire, parfois confondus avec la philosophie réaliste. La lecture des écrits d’Auguste Comte, dont la pensée incorpore la politique et la sociologie dans les sciences naturelles, laisse cependant peu de place au doute sur la dimension résolument moderne et révolutionnaire du positivisme. 

La loi des trois états

Accordant une grande place à l’Histoire, il y voit une évolution résumée dans sa loi des trois états, qu’il applique au politique comme à tous les domaines de la connaissance. Le premier état serait l’état théologique, dans lequel les hommes expliquent les événements à partir de causes surnaturelles (le destin, la Providence). Le second état est dénommé « métaphysique », des entités intellectuelles (liberté, égalité, droits individuels…) prenant la place des agents surnaturels. Cette période historique atteint son acmé avec la Révolution française. Vient nécessairement ensuite l’état positif, dans lequel les hommes abandonnent toute recherche des causes premières et des fins, qu’elles soient surnaturelles ou métaphysiques, au profit de la seule connaissance des lois scientifiques qui régissent le fonctionnement du monde tant physique que social. Il explique que cette méthode scientifique a d’abord été appliquée pour les mathématiques et la physique, avant d’« embrasser l’ordre vital » puis, dit-il, le positivisme «vient de s’étendre enfin, à l’ordre humain, collectif et individuel » [1]. Très marqué, comme la très grande majorité des auteurs de son temps, par la dominante biologique dans le domaine scientifique, sa méthode conduit à l’exposé d’une physique sociale, idée reprise par toute la sociologie qui examine les faits sociaux comme des objets d’étude scientifique soumis aux mêmes lois que tout organisme vivant. Pour Auguste Comte, « il en est, en politique des divers états de civilisation, comme des organisations diverses en physiologie » [2]. 

Une nouvelle religion

C’est au nom de…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Joël Hautebert

Ce contenu pourrait vous intéresser

SociétéPhilosophie

L’organicisme, une pensée matérialiste et fataliste

L'Essentiel de Joël Hautebert | Hérité des Lumières et du naturalisme du XIXe siècle, l’organicisme est un concept d’analogie encore utilisé aujourd’hui et qui a inspiré la sociologie. Si l’idée peut paraître juste, elle mène cependant au déterminisme, faisant de l’homme un être purement matériel, somme toute similaire aux végétaux et animaux.

+

organicisme
Société

Mont-Saint-Michel : faire le pont avec l’Archange

Entretien | La première édition du pèlerinage de Saint-Michel aura lieu du 8 au 11 mai 2025. Il commencera à Saint-Malo pour se finir au pied du Mont-Saint-Michel. Entretien avec Brieuc Clerc, président de l’association Pèlerinage de Saint-Michel. 

+

mont-saint-michel
SociétéLettre Reconstruire

Carlos Sacheri : Le travail humain (II)

Lettre Reconstruire n° 45 | Extraits | Dans notre précédent numéro (Reconstruire n°44), nous avons publié l’étude de Carlos Sacheri sur le travail humain. L’auteur présentait succinctement les conceptions libérales et marxistes à ce sujet. Nous continuons ici en abordant le travail selon une conception conforme à la loi naturelle.

+

travail humain carlos sacheri
SociétéLettre Reconstruire

Du pouvoir dans la modernité et la postmodernité

Lettre Reconstruire n° 45 (mars 2025) | La Bibliothèque politique et sociale | L’extension sans fin de l’État moderne que des épisodes récents, comme la gestion de la crise liée au Covid-19 ou actuellement la « guerre » déclarée entre la France et la Russie, mettent en évidence, conduit immanquablement à s’intéresser à la question du « pouvoir ». Javier Barraycoa a consacré un petit essai sur la situation du pouvoir dans nos sociétés postmodernes. Traduit en français, Du pouvoir bénéficie d’une substantielle préface de Thibaud Collin dont le titre indique tout l’intérêt.

+

du pouvoir dans la modernité et postmodernité
SociétéPhilosophie

Le sens des mots et le véritable enjeu du langage

C'est logique ! de François-Marie Portes | En tant que matière vivante, le langage évolue nécessairement et s’enrichit souvent de nouveaux mots pour exprimer au mieux la pensée. Mais certains néologismes sont utilisés pour nourrir des luttes idéologiques et dérivent alors de leur sens littéral. C’est notamment le cas du terme « homophobie » que l’on entend partout. 

+

sens des mots
Société

Intelligence artificielle (5/5) : L’IA à l’épreuve de la trisomie 21

DOSSIER « L’intelligence artificielle : entre innovation et responsabilité » | La trisomie 21 est caractérisée par une déficience intellectuelle mais celle-ci permet de souligner les autres formes d’intelligence – relationnelle, affective, de communication... – que les porteurs de trisomie possèdent souvent à un haut degré, faisant ressortir les pauvretés de l’intelligence artificielle. Démonstration que l’humanité ne se définit pas par des critères de performance mesurables. Entretien avec Grégoire François-Dainville directeur de la Fondation Jérôme Lejeune.

+

Intelligence artificielle IA trisomie 21