Aux sources des désordres liturgiques

Publié le 18 Juil 2023

Ce n’est pas à proprement parler un livre de plage mais la réédition par Renaissance Catholique du Bref examen critique tombe à point nommé cet été. Débat autour du pèlerinage de Chartres, synode sur la synodalité, effondrement des ordinations sacerdotales, nouveau préfet de la congrégation pour la doctrine de la foi…

La crise que traverse l’Église semble poursuivre inexorablement sa courbe fatale. Plusieurs facteurs, certainement, ont provoqué cette crise. Il en est un assurément central : la réforme liturgique et la promulgation de la nouvelle messe. Central autant que la messe est au centre de la vie de l’Église ; de la vie tout court d’ailleurs.

En 1969, les cardinaux Ottaviani et Bacci adressaient au pape Paul VI une étude conduite par des experts pour manifester leur inquiétude suite à la promulgation du nouveau missel. Ce travail critique initialement adressé seulement au pape, a par la suite été rendu public. Il a fait l’objet de nombreuses éditions dans le monde entier.

Renaissance Catholique avait déjà procédé à une réédition avec préface du cardinal Stickler en 2005 à l’occasion de l’année consacrée à l’eucharistie. Tirage épuisé, il vient donc d’être à nouveau édité accompagné de quelques textes contextuels et d’une préface du cardinal Burke.

Le point le plus connu du Bref examen est sa critique de l’article 7 de la Présentation générale du nouveau missel romain promulgué le 3 avril 1969 qui définissait la messe en ces termes : « La Cène du Seigneur ou Messe est la synaxe sacrée ou réunion du peuple de Dieu en un [même] troupeau sous la présidence du prêtre, pour célébrer le mémorial du Seigneur. Aussi la promesse du Christ : “Là où vous êtes deux ou trois réunis en mon nom, Je suis au milieu de vous” (Mt. XVIII, 20), cette promesse vaut d’une manière éminente pour [toute] assemblée locale de la sainte Eglise ».

Cette définition, plus que problématique, fut réécrite à la demande de Paul VI et donna lieu à une nouvelle édition du missel en mai 1970 : indice que le Bref examen critique avait vu juste et que ses inquiétudes étaient fondées. Cependant, si cette définition plus que défectueuse a été changée, le rit qui était construit sur la base de cette définition n’a pas été modifié et il porte dans ses rubriques, à la manière d’un gène, ce flou doctrinal problématique.

Critique théologique définitive ? Sans doute pas, tant le sujet est vaste et épineux et beaucoup d’ouvrages ont été publiés sur le sujet et le sont encore. Mais critique fondatrice, substantielle, construite, argumentée qui conserve sa pertinence. Puisse-t-elle d’ailleurs provoquer un débat de fond avec certains défenseurs de la réforme. C’est tout le bien que nous souhaitons à cette réédition 2023.

BEC liturgique

 

A lire également : Université d’été de Renaissance Catholique : réformer la pensée pour un véritable renouveau

Cyril Farret d’Astiès

Ce contenu pourrait vous intéresser

EgliseTribune libreLectures

Benoît XVI et François : deux lectures du Maître de la Terre de Benson, deux pontificats, deux églises ? (3/3)

3 - La démarche synodale comme processus du changement. | C’est bien toute la démarche synodale sur la synodalité qui, par son processus lui-même, est une machine à mettre en œuvre une Église plastique, compatible avec la modernité, c’est-à-dire sans contenu. Et cette démarche synodale trouve sa source, puise son inspiration et sa légitimité dans le concile Vatican II. Quelle lecture faire du Maître de la terre ? Ratzigérienne, bergoglienne ? Au lecteur de se faire une opinion, mais il faut lire Benson. 

+

synode évangélisation église
EgliseTribune libre

Benoît XVI et François : deux lectures du Maître de la Terre de Benson, deux pontificats, deux églises ? (2/3)

Une volonté farouche de changer de paradigme (2/3) | Tout d’abord, et en amont de l’élection, la volonté farouche de changement de ceux qui ont préparé le règne. En 2007 paraissait un livre très éclairant et remarquablement conçu dans la plus pure tradition de la manipulation de l’opinion. La thèse de ce livre-programme qui devait se révéler prophétique peut se résumer ainsi : l’Église, depuis Constantin et avec pertinacité, s’est éloignée du message évangélique. Ce phénomène s’accentue à partir de la Renaissance quand l’Église s’entête de plus en plus en s’opposant à la modernité. Constatant au XXe siècle que des génocides ont été perpétrés dans des pays chrétiens (Allemagne, Rwanda), il faut en tirer la conclusion que cette manière ancienne d’être chrétien était fausse et qu’il faut refuser les préoccupations dérisoires que sont la connaissance de la foi, le nombre d’entrées au séminaire ou de sacrements célébrés, car tout cela détourne de l’essentiel qui consiste à apporter davantage d’humanité.

+

pape François synode
EgliseTribune libreLectures

Benoît XVI et François : deux lectures du Maître de la Terre de Benson, deux pontificats, deux églises ? (1/3)

Nous nous interrogions en 2019 (1) sur le regard porté par Benoît XVI et François sur ce roman d’anticipation de tout premier rang qu’est Le Maître de la Terre de Benson. Plus personne (plus personne de sain d’esprit en tous cas) ne prétend à présent à la continuité entre les deux pontificats. Leurs ambitions, leurs idées, leurs spiritualités, leurs tempéraments que tout oppose trouveraient dans ce livre un point commun ? Non, décidément nous ne parvenons pas à comprendre. Si les deux pontifes ont recommandé ce livre puissant, les motifs en sont forcément différents. 

+

François maitre de la terre Benson
Tribune libre

Nietzsche : du biologisme par l’amoralisme à la subversion de la notion de vérité

IDÉES par Jean-Marie VERNIER, professeur agrégé de philosophie | Depuis quelques décennies, devant la décadence, voire l’effondrement progressif des sociétés occidentales et, notamment, de la France, certains courants de pensée prétendant faire école vont chercher chez Nietzsche les principes de leur analyse et en appellent à ces mêmes principes pour sortir de la crise de civilisation. Premier volet de notre présentation de la philosophie nietzchienne.

+

nietzsche
Tribune libre

De la nouvelle traduction du Pater

Tribune Libre | La mauvaise traduction du Notre Père dans la messe de Paul VI en français a fait en 2013 l’objet d’une juste rectification, entrée en vigueur en 2017. L’occasion pour les fidèles traditionalistes, restés attachés à l’ancienne formule, de faire un pas vers les autres catholiques en adoptant la nouvelle traduction, encore plus exacte.

+

pater
Tribune libreFiducia Supplicans

Liberté religieuse et licence morale

Tribune libre de Rémi Fontaine | Dans l’Église contemporaine on manifeste de plus en plus de répugnance à la désignation comme criminels de comportements gravement peccamineux, au nom de la dignité ontologique de la personne humaine. Une confusion qui découle du glissement de sens de la liberté religieuse.

+

wintzer liberté religieuse