Dédicace des basiliques de Rome dédiées aux Saints Apôtre Pierre et Paul

Publié le 18 Nov 2023
église basilique st pierre Rome
Non praevalebunt !

 

La liturgie de l’Église célèbre aujourd’hui la dédicace des basiliques de Rome dédiées aux Saints Apôtres Pierre et Paul. Vestige désuet voir même héritage encombrant à dilapider pour certains, cette fête présente, malgré tout, un grand intérêt.

En ces temps de synodalité aussi vague qu’obligatoire, où des princes de l’Église émettent parfois des propositions contraires à la Foi et à la Morale, menant le peuple chrétien à la confusion ; l’immuable cycle liturgique brave le contexte hautement abrasif de la crise mémorielle qui sévit dans la Sainte Église.

En effet, c’est d’abord parce que les chrétiens ont oublié leur catéchisme et les bases saines d’un raisonnement logique qu’ils deviennent souvent les dindons de leur propre farce.

Mgr Gay1 parlait du « déplorable à peu près […], qui ne rendant pas « gloire à Dieu » ne donnera jamais la « paix aux hommes » et dont le résultat a été de laisser libre cours à toutes les erreurs d’où naissent les impiétés légales et où s’appuient toutes les tyrannies. »2

Émile Poulat, commentant l’encyclique Aeterni Patris de Léon XIII soulignait que « la restauration chrétienne de la société [passe] par la restauration de l’intelligence chrétienne. »3 Et Gustave Thibon d’ajouter que « rien ne prédispose plus au conformisme que le manque de formation. »4

C’est pourquoi la constitution divine de l’Église, sa mission reçue du Christ et enfin le moyen pour l’accomplir, forment autant de points sur lesquels les deux Apôtres attirent notre attention, afin de n’être pas « emportés à tous vents de doctrine. »5 Loin de nous cette ambition de feuille morte !

 

Institution et marques de la véritable Église

Le premier concile du Vatican rappelle que « sans la Foi, il est impossible de plaire à Dieu ».6 […] Mais, pour que nous puissions satisfaire au devoir d’embrasser la vraie foi et de persévérer constamment en elle, Dieu, par son Fils unique, a institué l’Église et l’a pourvue de marques évidentes de son institution afin qu’elle puisse être reconnue par tous comme la gardienne et la maîtresse de la Parole Révélée. »7

Cela ressort manifestement des textes évangéliques relatifs à la fondation de l’Église : « Tu es Pierre et sur cette Pierre je bâtirai mon Église »8 et « Pais mes agneaux, pais mes brebis. »9

Le mot Église, ecclesia, signifie assemblée convoquée. Saint Robert Bellarmin définie ainsi l’Église catholique : « la communauté des hommes rassemblés par la profession de la vraie foi chrétienne et la communion aux mêmes sacrements, sous le gouvernement des pasteurs légitimes et principalement de l’unique vicaire du Christ sur la terre, le pontife romain. »10

Enfin, le symbole de Nicée précise : « Je crois en une seule Église, sainte, catholique et apostolique. » Ces quatre adjectifs sont appelés « marques » de la véritable Église.

Elle est une parce que tous ses fidèles croient les mêmes vérités de Foi révélées par Dieu, qu’ils reçoivent les mêmes sacrements et obéissent au même chef.

Elle est sainte parce que son fondateur Jésus-Christ est saint, que sa doctrine et ses sacrements sont saints, et qu’avec l’aide de la grâce divine, elle n’a cessé de former des saints parce que sa morale est sainte.

Elle est catholique, c’est-à-dire universelle parce qu’elle a été fondée pour tous les hommes de tous les pays et de tous les temps.

Elle est apostolique parce qu’elle a pour chefs les Apôtres puis leurs successeurs et enseigne la Foi reçue des premiers.

Mission divine de l’Église

Là encore, le premier concile du Vatican enseigne : « L’éternel pasteur et gardien de nos âmes11, afin de perpétuer l’œuvre salutaire de la rédemption, a décidé de fonder l’Église, […]. De même qu’il envoya les apôtres qu’il s’était choisis dans le monde12 comme lui-même avait été envoyé par le Père13, ainsi voulut-il qu’il y eût dans son Église des pasteurs et des docteurs « jusqu’à la fin du monde »14. »15

De fait, l’ordre du Christ est formel : « Allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils et du Saint-Esprit. »16

Dans ce but, ainsi que le rappelle le deuxième concile du Vatican, l’Église est « structurée par des organes hiérarchiques »17. Le saint concile de Trente précise qu’il y a « dans la structure parfaitement ordonnée de l’Église, plusieurs ordres différents de ministères. »18 Ce sont les degrés du sacrement de l’Ordre (évêque, prêtre, diacre etc.).

En outre, bien qu’en raison de la configuration au Christ opérée par le sacrement du baptême, il soit possible de parler de Sacerdoce commun des fidèles, Lumen Gentium rappelle qu’il diffère « selon son essence, et non pas seulement selon son degré » du Sacerdoce ministériel19, reprenant la doctrine du concile de Trente.20

Seuls les évêques font partie de l’Église enseignante ; seuls ils ont reçu avec la plénitude du Sacerdoce le pouvoir de gouvernement, en vertu de quoi, seuls, ils sont habilités à exercer en son nom, une partie des pouvoirs du Pontife Romain.

Les moyens de cette mission

« Lorsque le pontife romain parle ex cathedra, c’est-à-dire lorsque, remplissant sa charge de pasteur et de docteur de tous les chrétiens, il définit, en vertu de sa suprême autorité apostolique, qu’une doctrine en matière de foi ou de morale doit être tenue par toute l’Église, il jouit, en vertu de l’assistance divine qui lui a été promise en la personne de saint Pierre, de cette infaillibilité dont le divin Rédempteur a voulu que soit pourvue son Église lorsqu’elle définit la doctrine sur la foi ou la morale ; par conséquent, ces définitions du pontife romain sont irréformables par elles-mêmes et non en vertu du consentement de l’Église. »21

En effet, si Dieu s’est révélé, c’est pour que « tous les hommes puissent connaître, facilement avec une ferme certitude et sans aucun mélange d’erreur ce qui dans les choses divines » dépasse les forces de la raison humaine.22

Ce qui assure cette inerrance est justement le charisme d’infaillibilité garanti à Pierre « aux termes de la promesse divine de notre Seigneur et Sauveur : « J’ai prié pour toi, pour que ta foi ne défaille pas ; et quand tu seras revenu, affermis tes frères « .23 » 24

Deux conséquences découlent de ce bienheureux état de fait :

  • d’une part ce n’est pas à l’écoute de l’humanité rebelle que l’Église doit se mettre, mais à celle du Cœur de Dieu qui a fait le cœur de l’homme, selon la belle formule de saint François de Sales25.
  • d’autre part, le peuple fidèle n’attend pas des membres de l’Église enseignante qu’ils fassent part de leurs recherches théologiques mais qu’ils nous abreuvent aux deux sources de la Révélation que sont l’Ecriture-Sainte et la Tradition de l’Église qui s’exprime dans son Magistère authentique et immuable, sa liturgie séculaire ainsi que les écrits des Pères et des Docteurs.

Pastor Aeternus précise : « le Saint-Esprit n’a pas été promis aux successeurs de Pierre pour qu’ils fassent connaître sous sa révélation une nouvelle doctrine, mais pour qu’avec son assistance ils gardent saintement et exposent fidèlement la Révélation transmise par les apôtres, c’est-à-dire le « dépôt de la foi ».26 »27

Or, l’intelligence prime sur la volonté : c’est la découverte de la vérité qui déclenche le mouvement d’amour vers le bien. Nous pouvons donc conclure avec le cardinal Pie que « l’intégrité des doctrines est l’unique chance de rétablissement de l’ordre dans le monde. »28

 

 


 

  1. Vicaire général du cardinal Pie.
  2. Lettre au R. P. Berthe. Vie de Garcia Moreno – Lettres épiscopales.
  3. L’Église Romaine, le savoir et le pouvoir, Arch. Sc. Soc. des Rel., 37, 1974, 5-21.
  4. L’équilibre et l’harmonie, 1976.
  5. Eph 4, 14.
  6. He, XI, 6.
  7. Dei Filius, chapitre 3, DS 3012.
  8. Mt, 16, 18.
  9. Jn 21,17.
  10. IV° Controversia generalis, 1e tome : De Conciliis et Ecclesia militante, 3e livre : De Ecclesia militante, chapitre 2.
  11. 1 P 2,25.
  12. Jn 15,19.
  13. Jn 20,21.
  14. Mt 28,20.
  15. Pastor Aeternus, Préambule, DS 3050.
  16. Mt 28, 19.
  17. Lumen Gentium, Chapitre 1, n°8, DS 4118.
  18. 23e session, chapitre 2, canons 2 et 6, DS 1765.
  19. Chapitre 2, n°10, DS 4126.
  20. 23e session, chapitre 4, canons 1 et 6, DS 1767.
  21. Pastor Aeternus, chapitre 4, DS 3074.
  22. Dei Filius, chapitre 2, DS 3005.
  23. Luc 22, 32.
  24. Vatican I, Pastor Aeternus, chapitre 4, DS 3070.
  25. Traité de l’Amour de Dieu, I, 15.
  26. I Tim, 6,20.
  27. Chapitre 4, DS 3070.
  28. Œuvres, V, p. 203.

 

>> à lire également : La basilique, entre architecture et théologie politique

Chanoine Arnaud Jaminet +

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