> DOSSIER « Réflexions sur l’action politique »
Si désobéir est nécessaire lorsque l’État agit contre la foi ou les mœurs, plusieurs obstacles théoriques se dressent face au catholique soucieux de les défendre par l’action politique.
Comment concevoir la nécessité d’une action contestataire sans se poser la question de la désobéissance ? L’habitude des mouvements comme la Marche pour la Vie ou La Manif pour Tous a parfois laissé de côté la réflexion quant à l’enjeu moral de l’action, donnant la priorité à la praxis sur la justification doctrinale. Même si ces mouvements ont permis une certaine émancipation et une certaine politisation du milieu, banaliser la contestation de rue ou le lobbying médiatique qui l’accompagne normalise de fait un héritage insurrectionnel issu de la gauche révolutionnaire : le peuple faisant pression sur le gouvernement par l’effet de masse. L’apparente difficulté, c’est que le Catéchisme semble clair sur le respect dû à l’autorité politique. Il faut obéir au détenteur du pouvoir en tout ce qui n’est pas contraire à la foi et aux mœurs. La vertu de justice inclut la vertu d’obéissance. En effet, l’obéissance à l’État en vue du bien commun est une obéissance rationnelle. L’État sait mieux ce qui est bon pour le pays que le citoyen pris individuellement. Il possède la science et la prudence. L’enseignement de Léon XIII est également une difficulté à surmonter. Dans son encyclique Au milieu des sollicitudes, il invite les catholiques à « rallier » la République. Son jugement s’appuie sur la supposition suivante : puisqu’une république, en soi, est un système qui peut fonctionner, il s’ensuivrait que ce serait le cas de tout système républicain, quelle qu’en soit la forme ou les circonstances. La question morale n’est donc pas qu’un détail. Il faut une véritable réponse doctrinale pour justifier l’action de contestation politique. La solution doctrinale à ces difficultés, c’est d’abord une question de méthode. Le Catéchisme ou la doctrine sociale de l’Église ne sont pas des traités de science politique. L’attitude qui consiste à concevoir la Révélation ou l’enseignement de l’Église comme la seule norme du savoir naturel se nomme le fidéisme. L’Église a condamné le fidéisme. « En tout ce qui touche au bien de la Cité, il faut obéir plutôt au pouvoir temporel qu’au pouvoir spirituel, selon le passage de Matthieu : Rendez à César ce qui est à César » (Thomas d’Aquin, Sententiae, Livre…