Confiance, confidence et secret

Publié le 07 Nov 2015
Confiance, confidence et secret L'Homme Nouveau

La confiance appelle les confidences, notion qui crée comme une barrière à l’égard du profane pour protéger l’ouverture au mystère où se déploie le secret sous une forme positive et structurante. En effet, en faisant entrer dans le domaine du secret la confidence accède à la sphère du sacré. « Sacré Â» et « secret Â» rejoignent le « mystère Â», dont l’étymologie, venue du grec muw, dit également une séparation, une clôture : les yeux et la bouche se ferment devant l’indicible et l’ineffable ; il ne reste qu’à admirer en silence pour ne pas profaner par la parole intrinsèquement inadéquate. « Théologiquement parlant Â», écrit Pascal, « l’idée de secret est liée à celle de mystère divin. Toutes choses couvrent quelque mystère ; toutes choses sont des voiles qui couvrent Dieu Â» (Lettre à Mlle de Roannez).

« Maman, j’ai un secret à te dire Â» ; « le secret du Roi Â» ; « le jardin secret Â». Ces trois expressions charmantes sont surtout profondes, disant le lien entre le secret et le mystère de Dieu qui se fraie un chemin en nos existences. Elles manifestent l’ouverture au mystère qui s’invite chez nous par la médiation du secret. On voit là la fécondité sociale, métaphysique même, de la confiance, élément fondateur de la vie familiale ou économique, comme aussi et d’abord de la vie intérieure et spirituelle.

Le mystère en péril

Mais, hélas, ces réalités paraissent mythiques pour le grand nombre auquel le mystère est fermé. De plus, des termes d’apparence innocente mettent en péril le mystère et le secret qui y introduit. La transparence, par exemple, fausse jumelle de la loyauté, ou de l’honnêteté, discrédite et même « culpabilise Â» le secret, le place au banc des accusés, mettant en fin de compte en péril le rapport entre personne et société, le rapport entre les diverses strates sociales. Mais à l’inverse, il y a des secrets négatifs et déstructurant qui endommagent gravement la vie sociale, étouffant par exemple le secret pudique de l’enfant qui ouvre son cÅ“ur à sa mère. On parle aussi de sociétés secrètes qui usent de la confidence comme d’une arme pour marginaliser un groupe restreint aux dépens de l’ensemble de la famille humaine. C’est là que serait nécessaire une honnête transparence pour débusquer les pots-de-vin et la plaie du favoritisme, de la mafia qui est une réalité beaucoup plus que sicilienne.

Protéger l’homme et la société

En son sens positif le secret a pour vocation de protéger à la fois l’homme et la société. Le secret médical ou le secret professionnel tirent leur noblesse de relations privilégiées qui créent une connivence. Le secret bride et apprivoise la langue dont les excès sont si fréquents. Il aide à ne pas parler à tort et à travers, évite les bêtises qui blessent le prochain ; par sa retenue, il nourrit la modestie dans le langage, loin des dérapages inévitables à qui parle à vau-l’eau ou comme un moulin à vent. Le secret permet alors de proférer la parole d’or au bon moment devant la bonne personne : « La langue du juste est pur argent Â», dit le Proverbe (10, 20), et encore : « Pommes d’or sur ciselures d’argent, telle est la parole dite à propos Â» (25, 11). À l’inverse, parler à tort et à travers, en dévoilant les confidences, blesse gravement les relations, l’amitié tout spécialement. Le Sage de l’Ancien Testament le dit de façon remarquable (Siracide 22, 22) : « Une parole blessante contre ton ami ? Sois sans crainte ; la réconciliation est toujours possible. Mais la révélation d’un secret, c’est un coup de langue perfide : cela met en fuite tous les amis. Â» Et un peu plus loin (Si 27, 16ss) : « On bande une blessure, après une injure on se réconcilie ; mais celui qui a révélé des secrets n’a plus d’espérance. Aie honte de répéter ce que tu as entendu Â», dit encore le Sage, « aie honte de révéler des choses secrètes Â» (41, 26).

La santé en famille, la santé en société, la santé en politique tout spécialement, tiennent largement au respect du secret qui crée une sorte d’hygiène sécurisant la vie sociale. Cette hygiène morale, intimement liée à la vertu de prudence, gouverne le langage pour y mettre de l’ordre. L’enfreindre est plus mortel que le vol, porter atteinte au secret en tant que tel relève de la trahison. À le respecter, avec patience et courage, cela « recoud Â» ce qui a été déchiré. La parole à propos issue du silence et du secret respecté recompose et renforce le lien social. 

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