Avec une fête de Pâques assez tardive (21 avril), la période qui sépare le temps de Noël des préparations de la Septuagésime ou du Carême est assez longue. Au cours de cette première partie du temps ordinaire, l’Église nous fait regarder le Christ dans les faits et enseignements de sa vie publique. Dans son calendrier, elle propose aussi un certain nombre de saints à notre vénération et à notre imitation. Et, bien sûr, elle continue toujours son œuvre de sanctification. Dans les actes que comporte cette dernière, arrêtons-nous sur un geste si courant que son sens pourrait nous échapper : la bénédiction.
Notre terme latin, benedictio, correspond à l’hébreu berâkah et au grec eulogia qui désignent un don accompagné d’une parole. Montant vers Dieu, c’est la prière de louange telle que le cantique des trois enfants dans la fournaise (Dn 3, 52-90) ou encore nombre de passages des Psaumes (27, 6 ; 30, 22 ; 105, 48…). Venant de Dieu, c’est un cadeau pour les hommes, dans un sens d’abord assez matériel, puis plus largement spirituel. Il s’agit donc, de façon assez générale, d’une parole produisant le bien.
Le sens qui nous intéressera ici a été défini ainsi par un liturgiste : « Les bénédictions sont des rites approuvés par l’Église, accomplis en son nom par des ministres légitimes, ayant pour but ou bien de consacrer des personnes ou des objets au service de Dieu, ou bien de procurer aux fidèles des bienfaits spirituels ou temporels ». (1) Elles font partie des sacramentaux, c’est-à-dire « des signes sacrés par lesquels, d’une certaine manière, à l’imitation des sacrements, sont signifiés et obtenus à la prière de l’Église des effets surtout spirituels ».?(2)
Les deux livres liturgiques contenant les bénédictions sont le Pontifical, réservé à l’évêque, et le Rituel. Dans le premier, nous trouvons des bénédictions plus solennelles : un abbé, les saintes Huiles, durant la Semaine sainte… Le Rituel, quant à lui, regorge de bénédictions tous azimuts, pourrait-on dire. Les plus connues sont sans doute celles de l’eau ou de la table, mais la bienveillance divine est appelée sur tous les domaines : personnes (enfants, pèlerins…), habitations (comme les maisons à l’Épiphanie et au temps pascal), animaux ou fruits de la terre ou encore les objets (du chapelet à l’avion…). Arrêtons-nous à quelques prières qui nous montreront l’intérêt de la prière de l’Église pour les aspects les plus humbles de la vie.
Dans la longue prière de bénédiction d’une femme enceinte, il est dit notamment : « Gardez celle qui vous appartient et défendez-la contre toute la ruse et la malice d’un cruel ennemi (…). Que son enfant vienne au jour en bonne santé, qu’il soit conservé pour naître à la vie divine » (forme extraord.). Après la naissance, les relevailles disent à la mère : « Entrez dans le temple de Dieu et adorez le Fils de la Vierge Marie ; c’est lui qui vous a donné votre enfant. » Aux vieillards, l’Église souhaite « qu’en regardant le passé, ils se réjouissent de [l]a miséricorde [de Dieu] et qu’en regardant les années qui viennent, ils persévèrent dans la confiance et l’espérance » (f. ord.).
Toutes les prières mériteraient une égale attention et cette modeste évocation n’a d’autre ambition que d’encourager à demander aux prêtres de faire descendre la bienveillance miséricordieuse de Dieu sur tous les moments de la vie, avant de « devenir héritiers de la bénédiction » (1 P 3, 9) dans le Ciel.
1. Jules Baudot, Dict. d’Archéologie chrétienne et de Liturgie, t. 2, col. 671.
2. Code de Droit canon, can. 1166.