Hommage à Mgr Lagrange : la réalité de la liturgie

Publié le 19 Déc 2014
Hommage à Mgr Lagrange : la réalité de la liturgie L'Homme Nouveau

Évêque émérite de Gap, Mgr Georges Lagrange est mort le jeudi 11 décembre dernier. Évêque missionnaire, il avait accordé à l’abbé Claude Barthe un entretien portant sur la nouvelle évangélisation et le rôle de la liturgie dont nous publions l’intégralité ci-dessous. Les funérailles de Mgr Georges Lagrange ont été célébrées le lundi 15 décembre à Châtillon-sur-Chalaronne. 

L’une des visées du mouvement liturgique était la formation des fidèles et du clergé à la liturgie et par la liturgie – la catéchèse liturgique. Les réformateurs de l’après-Concile ont privilégié la modification des textes et rites à ce labeur pastoral de fond. Ne pensez-vous pas qu’un des remèdes à la situation cultuelle présente serait de s’y consacrer enfin ?

Mgr Georges LAGRANGE – Il est certain qu’une formation liturgique à proprement parler serait nécessaire, mais aussi une formation chrétienne dans toutes ses dimensions, spirituelle, biblique, doctrinale. Pour se situer vraiment au cœur de la sphère chrétienne, de la Trinité, du mystère de la Révélation, on doit en effet accomplir ce travail de formation, qui suppose aussi la formation des formateurs. Mais cela représente, à mon sens, un gros problème.

De grands efforts sont actuellement accomplis, surtout en faveur de ceux qui sont appelés à prendre des responsabilités dans l’Église. On voit un certain nombre de laïcs obtenir des licences de théologie, ce qui était rarissime autrefois. C’est une bonne chose, mais il faut se rendre compte, d’une part, que ces enseignements ne touchent qu’une partie infime de la population et, d’autre part, que leur contenu pose un problème qu’il faut examiner de près et qui n’est pas toujours très facile à maîtriser.

La formation religieuse du peuple chrétien – ce qui voulait dire, dans les temps passés, de la quasi-totalité de la population occidentale – se faisait essentiellement, au moins depuis le XVIe siècle, par le catéchisme et la prédication du dimanche. Aucune formation ne touchera jamais autant que celle-là. Il faut donc aujourd’hui encore insister sur l’importance du catéchisme, de la prédication dominicale, insister sur leur contenu, leur profondeur, leur fidélité. Leur fidélité est quelque chose d’extrêmement important.

Mais le public paroissial a fondu comme neige au soleil des temps nouveaux.

Il y a, certes, aujourd’hui beaucoup moins de monde à la messe du dimanche, mais il y vient beaucoup plus de monde qu’il n’y a de participants aux cycles de formations par cours ou par correspondance. La messe dominicale reste cependant un des moments où l’on peut rencontrer le plus de monde. Mais il est vrai que la diminution est très inquiétante : les sociologues qualifient aujourd’hui de « régulier » un pratiquant qui va à la messe une fois par mois.

Ce qui est plus grave encore, c’est la diminution des enfants catéchisés. Il y a quelques années, le public dominical avait déjà largement diminué, mais les enfants passaient encore presque tous par le catéchisme. Or depuis quelques années la proportion des catéchisés a énormément baissé. Le taux des baptêmes de petits enfants reste assez fort, mais il diminue aussi. Je ne sais pas jusqu’où cela ira, mais lorsque aujourd’hui des baptisés qui n’ont pas été au catéchisme se marient à l’église, cela soulève de grosses difficultés : ce n’est pas en trois ou quatre rencontres de préparation au mariage que l’on rattrape des années de catéchisme. Sans parler des problèmes que peut soulever le catéchisme lui-même, avec des instruments catéchistiques qui ne sont pas toujours ce que l’on pourrait souhaiter et des catéchistes pleins et pleines de bonne volonté, mais qui n’ont pas toujours la formation suffisante.

Le problème liturgique est donc à replacer dans un contexte pastoral fort inquiétant.

Il est évident que tout se tient, liturgie, morale, prière personnelle, toute une conception, une initiation en profondeur aux mystères chrétiens. Sans jamais peut-être l’avoir dit explicitement, sans l’avoir théorisé, on a longtemps considéré que, dans nos pays, on naissait chrétien, on grandissait chrétien, sachant automatiquement ce que c’était que d’être chrétien. La conception de la liturgie s’en ressent, et risque d’être plus moraliste que de tenir suffisamment compte de l’essentiel du mystère chrétien.

On voudrait, en outre, obtenir tout de suite des résultats concrets, pratiques et applicables à la vie quotidienne, sociale. Cette conception, je crois très enracinée, est extrêmement grave, qui fait de la foi et de Dieu lui-même des instruments au service de la société. La vertu d’espérance se réduit alors à penser qu’il y aura demain une société meilleure que la nôtre et que la tâche de l’Église est de travailler à son avènement. Ce qui est en fait une perte du sens de Dieu.

Il faut repartir sur des bases solides. Une nouvelle évangélisation ne peut avoir lieu de la même façon qu’une première évangélisation, parce que l’on n’a pas affaire à des populations qui ignorent ce qu’est le christianisme, mais à des populations qui ont vécu dans le christianisme et qui en gardent un certain nombre de traces, sans plus le vivre en profondeur.

Il n’est pas possible, du point de vue pastoral, de trancher dans le vif, comme on l’a quelquefois proposé, et de miser sur la qualité plutôt que sur la quantité, d’autant qu’on risque de perdre les deux à la fois.

Il est essentiel de maintenir des repères personnels, des personnes qui sont des repères pour le peuple chrétien : les prêtres, les religieux, les religieuses qui représentent pour lui ceux qui ont à maintenir le cap. Dans la mesure où l’on a, comme disent les sociologues, un peuple chrétien « multitudiniste », le rôle de cette minorité de prêtres et religieux est d’autant plus marquant et important. Il est vrai que, dans la mesure où l’on aurait de petites communautés plus ferventes et mieux formées, la différence entre clergé et religieux et les autres pourrait être considérée comme moins forte. Mais il reste tout un peuple qui se trouve abandonné à l’incroyance ou l’indifférence et à tous ces nouveaux mouvements religieux, ou même à l’Islam ou au bouddhisme qui s’implantent chez nous, il reste un peuple qui a besoin de ces repères.

C’est dans ce contexte général qu’il faut penser le problème de la liturgie. Si l’on en fait un problème en soi, séparé des autres questions pastorales, on n’aboutira pas à grand-chose.

De ce point de vue-là, la réforme liturgique telle qu’elle est pratiquée n’a pas apporté les fruits en profondeur qu’on pouvait espérer.

Je ne le pense pas. Au fond, le fruit majeur, à long terme, que l’on pourrait escompter, serait de nous faire nous poser à nous-mêmes des questions fondamentales : qu’est-ce que c’est que la liturgie et qu’est-ce qu’une vraie liturgie ? On avait peut-être trop pris l’habitude de voir dans la liturgie quelque chose d’automatique où tout était prévu dans le détail. Ce n’est plus ainsi. Il en va de même pour bien d’autres choses. On a ainsi longtemps considéré la morale comme quelque chose qui allait de soi. On s’aperçoit aujourd’hui que ça ne fonctionne pas du tout comme cela.

Toutes ces questions fondamentales ne se résolvent pas en un moment : il faut le temps d’une réflexion, d’une formation, d’une expérience sur le terrain, qui permette de mettre en place peu à peu des manières de vivre, de penser, de faire, qui soient mieux adaptées, en sachant d’ailleurs que l’on n’arrivera jamais à quelque chose de totalement parfait. Mais à long terme, tout cela peut porter un fruit très riche pour l’Église.

Je crois à une évangélisation authentique qui s’appuie sur un sentiment religieux qui est une très grande chose. Il y a une conversion possible à partir de la religion naturelle qui ne consiste pas à l’abandonner mais à la purifier, à l’approfondir et à la rendre conforme à la Révélation. C’est à proprement parler l’initiation chrétienne, même si le mot initier n’a pas aujourd’hui très bonne réputation, parce qu’il fait penser aux sectes (terme que j’évite pour ma part d’employer, parce qu’il finit pas être appliqué à tout et n’importe quoi).

On a vécu, en Occident, une aventure extraordinaire, celle de l’extension de la christianisation à l’ensemble des populations, toutes les structures socio-politiques, la culture, le langage étant profondément imprégnés de christianisme. Cela n’était pas parfait, parce que, sur terre, rien n’est parfait. Bien des défauts, des insuffisances, ont fait que la formation en profondeur est devenue très insuffisante et que tout cela s’est écroulé avec une rapidité assez surprenante. Les statistiques nous montrent, en cinquante ans, l’effondrement des vocations sacerdotales et religieuses, de la pratique dominicale, du mariage, aujourd’hui de la catéchèse, des baptêmes. Je compare cela à une coquille d’œuf : lorsque l’œuf est plein, on peut appuyer, il est solide est ne casse pas, mais si on appuie du bout du doigt sur une coquille vide, tout s’effondre.

La coquille était vide et les églises le sont devenues. Le moins que l’on puisse dire n’est-il pas que les réformes n’ont retenu personne de partir ?

Certains ont été retenus. D’autres seraient partis sans cela. Certains enfin seraient peut-être restés et sont partis à cause de cela. Bien d’autres facteurs sont intervenus en ce qui concerne la pratique religieuse et il est toujours difficile de dire ce qui se serait passé si ces modifications n’étaient pas intervenues. Je crois surtout qu’il a fallu cette désaffection pour que l’on se rende compte de la situation réelle : on n’avait pas analysé en profondeur le contenu mental du peuple chrétien ; et l’on s’est aperçu que bien des choses qui nous paraissaient solides comme le roc sont tout d’un coup parties en poussière. L’évangélisation n’est jamais faite une fois pour toute. Il faut continuellement évangéliser, quotidiennement ré-évangéliser.

Beaucoup de pratiques de piété en dehors de la messe ont disparu. C’est d’autant plus regrettable qu’une partie des baptisés ne vivent pas vraiment le mystère chrétien dans ses dimensions les plus fondamentales. Il pourrait donc y avoir dans des rites populaires, un entre-deux dans lequel ces gens-là pourraient se retrouver avec des formes beaucoup plus faciles et conviviales. On pourrait faire toutes sortes d’adaptations, sans que cela pose de gros problèmes. Le drame est que les adaptations sont faites dans la liturgie proprement dite, pour qu’elle soit plus « sympa « . Du coup, sa signification profondément spirituelle et spécifiquement chrétienne risque de se noyer un peu – je crois que c’est un défaut assez ancien – dans une tendance moraliste.

Vous faites allusion aux reproches adressés à la liturgie actuelle. À quoi vous semblerait-il le plus facile de remédier ?

La liturgie actuelle se pratique de manière assez diverse. L’aspect peut-être le plus voyant, qui a provoqué le plus de discussions, a été la liquidation de tout un patrimoine de chants, de formules, d’habitudes, que ni le Concile ni les réformes qui sont venues après le Concile n’avaient d’ailleurs demandée, mais qui a été considérée comme faisant partie de la réforme liturgique. Le Concile lui-même a demandé de conserver le chant grégorien, la langue latine, et les permissions ont été données en rappelant que, partout, il faudrait que les fidèles continuent à savoir l’ordinaire de la messe en latin.

Vous êtes pour la réintroduction du chant grégorien dans les paroisses ?

Oui, mais il faut bien s’entendre : on ne peut pas faire d’une paroisse un monastère, ni pour la liturgie, ni pour la vie quotidienne. J’ai des souvenirs de paroisses de régions très chrétiennes où l’on chantait tout le graduel à la messe du dimanche. Je ne sais si c’était ce que l’on faisait de mieux, car le massacre était épouvantable. Mais je crois que ce serait sagesse de chanter les ordinaires de la messe, un Kyrie, un Gloria, un Credo, ce qu’avait d’ailleurs demandé le document Jubilate Deo. Cela se remet en route dans un certain nombre d’endroits.

Une des grandes raisons que l’on donne pour ne pas le faire est : « Plus personne ne connaît ces chants ». Après avoir refusé de les faire chanter pendant vingt ans, on dit que personne ne les connaît… Ce qui n’est d’ailleurs pas vrai : je constate que, lors des grands rassemblements, quand on prend un Credo III, il est plus chanté que les cantiques.

Un autre problème est celui de la surproduction actuelle de cantiques, si nombreux qu’on ne les sait plus et qui varient trop d’une paroisse à l’autre. Il y a quelques jours, j’ai entendu un Chez nous soyez Reine à faire trembler les vitraux. En revanche, dans un grand rassemblement comme celui de Reims, où il y avait une énorme foule, on a voulu faire chanter un chant d’entrée qui était très beau, mais avec un rythme qu’une foule de plusieurs centaines de milliers de personnes en plein air ne peut pas tenir. On veut souvent profiter des grands rassemblements pour lancer des chants nouveaux. Le résultat est généralement lamentable, parce que les gens ne peuvent pas apprendre un chant en cinq minutes.

Un point qui me semble particulièrement important serait de distinguer beaucoup plus radicalement les cantiques des chants liturgiques proprement dits, c’est-à-dire les textes de la messe, le Gloria, le Credo, le Sanctus, l’Agnus, dont les paroles sont celles du missel lui-même et auxquelles il ne faut pas toucher. Les cantiques sont ce qu’ils ont toujours été : il y en a de bons, il y en a de moins bons. Mais il me paraît grave qu’il suffise de fabriquer un cantique avec le mot « gloire » pour qu’il remplace le chant liturgique du Gloria, avec le mot « saint », pour qu’il remplace le Sanctus, avec le mot « paix » pour qu’il remplace l’Agnus Dei. Le Sanctus est un texte biblique, qui fait partie de la tradition chrétienne, et même judéo-chrétienne, qu’on remplace trop souvent par des fadaises. Si on chante en français, que l’on nous donne au moins la traduction du texte latin. C’est d’ailleurs ce que l’on a dit à Rome à la Commission Liturgique : le Saint-Père a demandé que, désormais, quand on fait des traductions de textes liturgiques, ce soient des traductions beaucoup plus littérales et non pas de ces « belles infidèles » – qui sont d’ailleurs plus ou moins belles.

On doit un certain respect au peuple chrétien. Le Code de Droit Canonique y insiste beaucoup : les chrétiens ont le droit d’avoir une liturgie qui soit la liturgie de l’Église et non pas la fantaisie du célébrant ou du pasteur local. Je suis par exemple très mal à l’aise, quand je célèbre la messe, lorsque, à la fin de la préface, je n’entends pas « Saint, saint, saint ». Je pense que l’on est en droit de dire : « Cela fait partie de la liturgie ! » On fait cela pour plaire aux gens, pour être au niveau du peuple, et on ne respecte pas le peuple chrétien. On se fait une idée de ce qui plaît aux fidèles, mais il s’agit en fait, soit de ses propres idées, soit de celle de quelques chrétiens qu’on embauche pour choisir les cantiques du dimanche, mais pas de l’ensemble de la population.

Précisément, pour savoir si les réformes opérées correspondent réellement aux besoins, il ne s’agit pas de faire des referendums…

Sûrement pas ! On voit ce que ça donne dans d’autres domaines.

…mais il serait bon de pouvoir tout de même parler de ces questions librement et clairement. Le monde catholique des États-Unis connaît actuellement des discussions ouvertes sur le thème de « la réforme de la réforme ». Ne pensez-vous pas qu’une discussion franche et libre devrait s’ouvrir chez nous au sujet du bilan positif et négatif que l’on peut établir après trente ans de réforme liturgique dans les paroisses ?

Oui, je crois qu’il faudrait arriver à parler plus sereinement de part et d’autre des mesures à prendre. L’un des problèmes de la réforme liturgique, c’est qu’elle a été à la fois trop profonde et trop rapide. Je vous avoue que je désirais pour ma part le changement d’un certain nombre de choses dans la liturgie. Mais je ne m’attendais pas à quelque chose d’aussi radical.

Pour améliorer la situation actuelle, il ne faudrait pas refaire la même erreur en sens inverse et faire un autre changement radical et rapide. On pourrait commencer par admettre qu’il puisse y avoir plusieurs formes liturgiques, l’ancienne et la nouvelle. On a commis, à mon avis, une erreur – il est évidemment plus facile de s’en apercevoir trente ans après que sur le moment – en voulant supprimer l’ancienne forme liturgique. On aurait pu dire : « Voilà un nouveau missel, dont il est permis de se servir chaque fois qu’on le veut ». On s’y serait habitué petit à petit. On n’a d’ailleurs jamais été capable de dire si l’ancienne liturgie avait été interdite ou non, ce qui a produit un flou extraordinaire, permettant à n’importe qui de dire n’importe quoi. Quand on fait des lois, il faut essayer de faire qu’elles soient claires, et pour qu’elles soient claires de ne pas en faire trop. Pendant des années, il y a eu des modifications continuelles. Des choses qui n’étaient pas permises sont devenues permises et souvent des gens posaient des actes contraires à ce qui était autorisé en se disant qu’ils finiraient par être autorisés. Et dans certains cas, c’est en effet ce qui s’est passé, ce qui était donner une prime à la désobéissance.

Il faudrait s’efforcer de réaliser du solide et du sérieux dans la production des revues liturgiques, éditions de missels, publications de cantiques, car il existe une démocratisation et une massification qui ne facilitent pas les choses. Les publications de Prions en Église sont par exemple très commodes pour que les fidèles se retrouvent dans la liturgie – la plupart n’y parviennent pas dans un vrai missel, surtout à cause du cycle de lectures des années A, B, C. Mais je vois des prêtres, voire des évêques, célébrer la messe avec Prions en Église ! Cela m’est d’ailleurs arrivé à moi-même quand j’ai été célébrer la confirmation dans des paroisses où il n’y avait rien d’autre de disponible. Il n’était pas possible de faire autrement, mais c’est lamentable. Au moment où on veut mettre en honneur la parole de Dieu, on la lit sur un petit bout de papier chiffonnable, jetable.

Il y a sûrement des choses possibles à faire, mais il faudrait que les principaux responsables de l’Église s’accordent à ce sujet, mettent en pratique leurs idées et essayent de les faire appliquer, non au moyen de décrets, mais par la persuasion et l’exemple. Je crois qu’il y a une véritable attente en ce sens, y compris dans les jeunes générations.

Vous pensez, vous aussi, que les jeunes générations pourraient être plus sensibles à un vrai discours de réforme ?

Il me semble, mais malheureusement les jeunes générations ne sont pas très nombreuses dans les églises.

Je voulais dire les jeunes générations cléricales.

Elles sont encore moins nombreuses que les non cléricales, mais très différentes des anciennes, c’est vrai. Cela s’explique en partie, je crois, par le fait que ces jeunes n’ont pas mené le combat liturgique d’il y a trente ans : quand on s’est battu pour ou contre une cause, on change difficilement de camp. Il y a moins d’a priori aujourd’hui.

Je dis souvent – ce n’est pas pour souhaiter la disparition de qui que ce soit – que le jour où tous ceux qui ont participé à ces luttes liturgiques très âpres ne seront plus sur terre, les générations qui ne les ont pas connues seront beaucoup plus libres pour en discuter.

On peut tout de même essayer dès maintenant…

Bien sûr, mais en étant conscient de la grande difficulté. « Il faut donner du temps au temps « , disent les lyonnais. Le temps change les perspectives. Des prêtres qui célèbrent la liturgie tridentine m’ont raconté qu’un jeune de vingt-cinq ans, qui assistait à leur messe, leur avait dit : « Elle est formidable votre messe ! C’est drôlement mieux que les messes traditionnelles ! ». Pour lui, les messes « traditionnelles » sont celles qui n’ont pas plus de vingt ans…

Entretien publié initialement dans : Reconstruire la liturgie, éditions François-Xavier de Guibert, 1997,
« Rencontre avec Mgr Georges Lagrange – Le respect dû au peuple chrétien » (pp. 103-115).

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