Le sermon sur Le monde invisible de 1837 a beau être un de ses plus célèbres, il ne semble pas que ce thème si important pour comprendre le bienheureux John Henry Newman (et tout autant pour comprendre avec lui les réalités spirituelles) ait jamais fait l’objet d’une étude aussi approfondie que celle que nous offre ici l’auteur. C’est dire l’importance de cet ouvrage. Une première partie montre pourquoi l’attention à l’invisible, ce monde pour lui plus réel que le présent, fut centrale dans la vie et l’œuvre de Newman, à partir de l’étude des expériences existentielles et spirituelles depuis l’enfance, des lectures et études, de la profonde connaissance de la Bible et des Pères, de l’environnement romantique. La seconde partie se lance dans l’exploration du monde invisible avec Newman pour guide, essentiellement à travers les sermons de la période anglicane.
L’enquête est menée de façon remarquable, serrant au plus près les textes. Après avoir précisé les termes qui désignent cet autre univers, l’auteur propose plusieurs approches newmaniennes, descriptives et antithétiques pour en montrer la réalité, la présence et la richesse, concrètes et parénétiques (relatives à l’exhortation morale) pour en dessiner les accès : le Christ, l’Église, les sacrements et la sainteté. Au terme du parcours, Newman apparaît comme un guide vers les réalités premières et éternelles aussi sûr pour notre temps que Dante le fut dans le sien, et nous convainc que « le bon usage du monde est de nous inciter à en chercher un autre ».
Frédéric Libaud, Voir l’invisible, le monde surnaturel chez John Henry Newman, Saint-Léger Éditions, 426 p., 24 €.