Vers un accord Israël-Saint-Siège

Publié le 29 Fév 2012
Vers un accord Israël-Saint-Siège L'Homme Nouveau

« Des progrès vraiment substantiels »… En langage diplomatique, cela signifie une nette avancée, sanctionnant ici un long travail entre le Saint-Siège et l’État d’Israël. Il y a deux ans, on ne parlait que de « compréhension mutuelle »… Le commun a du mal à se représenter ces subtilités de langage qui aboutissent finalement à des résultats extrêmement concrets. Les choses avancent donc. Elles sont même, visiblement, sur le point d’aboutir.

L’histoire des rapports entre le Vatican et Israël est complexe. Liées naturellement à la question palestinienne mais aussi à celle de la protection des minorités chrétiennes, les relations entre les deux parties se sont fortement améliorées grâce à l’accord de reconnaissance mutuelle du 30 décembre 1993. Ce fut l’œuvre de la diplomatie de Jean-Paul II, relayée par l’archevêque Jean-Louis Tauran, à l’époque secrétaire pour les relations du Saint-Siège avec les États. Le gouvernement de l’Église prit simplement acte de la reconnaissance de l’État d’Israël par plusieurs pays arabes et surtout par l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP).

Le Vatican, qui ne pouvait être mis à l’écart des négociations de paix dans la zone, s’engouffra dans la voie de l’apaisement et prit l’initiative d’un accord qui aboutit à l’échange d’ambassadeurs. Or, dans cet accord, il était prévu que les parties se rencontrent régulièrement afin de régler les questions relatives à la fiscalité et aux propriétés de l’Église. En effet, le Saint-Siège réclame à la fois la reconnaissance des droits juridiques et patrimoniaux de ses congrégations, ainsi que la confirmation des exemptions fiscales obtenues au moment de la création de l’État d’Israël en 1948 (cf. H.N. n°1461 du 16 janvier 2010). Il s’agit donc bien et avant tout d’un problème de souveraineté. Les discussions reprirent en 1999 jusqu’en 2004 mais sans résultat probant. Le voyage de Benoît XVI en Terre sainte au mois de mai 2009 relança un processus qui s’essoufflait sérieusement, victime en quelque sorte de l’instabilité politique de l’État d’Israël. Depuis, une commission permanente de travail entre le Saint-Siège et Israël se réunit tous les six mois afin d’examiner les points de désaccord. Ces rencontres ont lieu alternativement à Rome et à Jérusalem. Soutenu par l’Onu, le Vatican obtint gain de cause dans un premier volet de négociations sur une centaine de ses propriétés, mais des difficultés de souverainetés persistaient sur six lieux de culte à Jérusalem et en Galilée.

Un deuxième volet de négociation devait donc s’engager afin de régler ces questions au cœur du différend fiscal et juridique. À la fin du mois de janvier dernier, une nouvelle rencontre a eu lieu à Jérusalem, présidée par le nonce apostolique, Mgr Antonio Franco et le vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Danny Ayalon. À la suite de cette réunion, Mgr Franco fit part de l’avancée des travaux qui, déclara-t-il, « font espérer que dans des délais raisonnablement brefs, on pourrait arriver à la conclusion de cet accord qui traite tous les aspects pratiques de la vie et de l’activité de l’Église en Israël : impôts, Lieux saints… ».

 Il ajouta qu’il ne restait que

« quelques questions »

 à régler afin de 

« trouver des réponses à des problématiques concrètes ». 

D’après un site d’information israélien, le Saint-Siège accepterait de renoncer à sa souveraineté sur le Cénacle en échange d’un accès locatif aux Lieux saints. Rome savait que la souveraineté d’Israël ne serait pas négociable : 

« Tout ce qui concerne Jérusalem et le Mont Sion va rester sous souveraineté israélienne entière. La question n’est pas négociable »,

 avait déclaré Danny Ayalon en 2009. Le Vatican paierait aussi une taxe de propriété – chose qu’il se refusait à faire, mais celle-ci serait fortement réduite. Dans l’affaire, on peut donc dire que les autorités de l’Église catholique ont fait preuve d’une extrême ouverture, assez révélatrice du pontificat de Benoît XVI qui n’a de cesse de trouver des solutions concrètes aux problèmes qui se présentent à lui. Une façon aussi de s’imposer dans un jeu diplomatique extrêmement complexe qui ne saurait se réduire à cette question fiscale et juridique. En faisant des concessions, le Saint-Siège prend date pour l’avenir et saura les rappeler en d’autres occasions.

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