Un acte médical assumé

Publié le 18 Juil 2012
Un acte médical assumé L'Homme Nouveau

« Un acte médical assumé ». Jolie périphrase de François Hollande en visite le 17 juillet au centre de soins palliatifs Notre-Dame-du-Lac de Rueil-Malmaison, concluant au terme de deux heures en compagnie des soignants, des malades et de leur famille, qu’il était sans doute temps « d’aller plus loin dans des cas exceptionnels, quand la douleur est irréversible et appelle un acte médical assumé ». Une manière diplomatique et rusée de relancer le débat sur la fin de vie. Un débat qui « doit être noble et digne », a-t-il ajouté. Heureuse nouvelle ! La réflexion sera menée par le Professeur Didier Sicard, président d’honneur du Comité National Consultatif d’Éthique, qui a au moins le mérite d’inquiéter l’ADMD pour ses convictions « proche de la morale catholique ».

Si le président de la République doit tenir une de ses promesses de campagnes, ce sera certainement celle de l’euthanasie et il s’y prend bien. Il n’a pas fait de visite officielle au docteur Bonnemaison (condamné pour plusieurs actes d’euthanasie), ni même à l’ADMD. Il s’est rendu dans un centre de soins palliatifs, l’antithèse même de l’acharnement thérapeutique en même temps que de l’euthanasie. Qui serait assez fou aujourd’hui pour remettre en cause la mise en œuvre croissante – quoique toujours insuffisante – des soins palliatifs ? Qui ne saluerait pas l’immense travail humain et médical accompli chaque jour au chevet des mourants ?

FH acte médical

Mais voilà, l’accompagnement jusqu’à la mort naturelle, qui paraissait être dû à chaque homme en raison de son humanité même, est insidieusement présenté aujourd’hui comme un droit que chacun est libre de réclamer. Ou non. Lassé, ou peut-être effrayé, du combat frontal entre culture de vie et culture de mort dans lequel il n’était pas toujours certain d’être vainqueur, le monde moderne voudrait donner l’illusion qu’elles ne sont plus deux paradigmes qui s’affrontent mais une alternative amorale. Bénéficier des soins palliatifs serait un droit au même titre que recevoir ou s’administrer soi-même une injection létale. Le monde moderne feint de ne plus fouler au pied le respect de la vie pour octroyer le droit à donner la mort, il voudrait que tout fût permis. Surtout de tuer. Spécialement ceux qui coûtent cher sans plus consommer. Ceux qui, en somme, sont un grain de sable dans les rouages de l’économie libérale puisqu’ils coûtent sans consommer ni produire.

Viendra peut-être un temps où ceux qui auront choisi de vivre leur vie jusqu’à son terme naturel, parce qu’ils assumeront leur dépendance envers le corps médical et leurs proches et parce qu’ils assumeront de « coûter cher » à la société malgré le discours moralisateur et culpabilisant dont on nous assomme déjà, seront des héros grands et forts de leur petitesse et de leur faiblesse. Leur vulnérabilité n’est qu’un appel lancé chaque minute de leur existence pour rappeler à la société qu’il n’y a de vraie richesse que d’homme.

Adelaide Pouchol

Adelaide Pouchol

Ce contenu pourrait vous intéresser

A la uneSociétéLettre Reconstruire

L’Église face au socialisme (II)

Lettre Reconstruire n°35 (avril 2024) | Dans la série de ses études synthétiques sur les idéologies modernes, Carlos Sacheri aborde le socialisme et le jugement de l’Église sur cette réaction aux injustices sociales nées du libéralisme économique. Il présente ici les points communs à toutes les idéologies socialistes.

+

socialisme
SociétéLectures

L’inégalité, un outil de civilisation ?

Entretien | Juriste et historien, Jean-Louis Harouel s’attaque dans un livre récemment paru au mythe de l’égalité. Il postule que cette « passion laide » contemporaine, destructrice de la famille, entre autres, ne sert en rien les intérêts d’une population, en montrant que seule l’inégalité, créatrice de richesses, encourage la production et par là-même augmente le niveau de vie et conditionne le progrès moral et scientifique. Entretien avec Jean-Louis Harouel sur son livre Les Mensonges de l’égalité. Ce mal qui ronge la France et l’Occident.

+

égalité mythe
SociétéEglise de France

Pandémie : un avant-goût de la restriction des libertés fondamentales ?

Entretien | Le colloque « Pandémie, Droit et Cultes » s’est tenu à Paris en mars 2022. Ses actes rappellent qu’entre 2020 et 2022, les prérogatives de l’État ont été augmentées de manière extraordinaire au détriment des libertés essentielles, dans un renversement complet de la hiérarchie des biens. Une situation dangereuse qui pourrait bien se reproduire sous des prétextes variés. Entretien avec Guillaume Drago, co-organisateur du colloque et professeur de droit public à l’université de Paris-Panthéon-Assas.

+

pandémie liberté de culte