L’édito de la lettre n°33 de Reconstruire (février 2024) propose de revenir sur des extraits de l’encyclique Evangelium Vitae. Jean-Paul II y affirmait l’illégitimité d’une loi immorale.
Le thème de la constitutionnalisation de l’avortement en France et le projet de légalisation de l’euthanasie ont réactivé de manière frappante la question de la légitimité d’un État institutionnalisant ces formes de meurtres. Dans son encyclique Evangelium Vitae (25 mars 1995), le pape Jean-Paul II avait abordé ces deux thèmes en les liant justement à la moralité des lois édictées et à leur légitimité. Comme éditorial de ce numéro n°33 de Reconstruire, nous proposons plusieurs extraits de cette encyclique, hélas toujours d’actualité.
La position du magistère sur l’avortement et l’euthanasie
Avec l’autorité conférée par le Christ à Pierre et à ses successeurs, en communion avec tous les évêques de l’Église catholique, je confirme que tuer directement et volontairement un être humain innocent est toujours gravement immoral. Cette doctrine, fondée sur la loi non écrite que tout homme découvre dans son cœur à la lumière de la raison (cf. Rm 2, 14-15), est réaffirmée par la Sainte Écriture, transmise par la tradition de l’Église et enseignée par le magistère ordinaire et universel. (n. 72)
Des lois qui n’en sont pas
Les lois qui autorisent et favorisent l’avortement et l’euthanasie s’opposent, non seulement au bien de l’individu, mais au bien commun et, par conséquent, elles sont entièrement dépourvues d’une authentique validité juridique. En effet, la méconnaissance du droit à la vie, précisément parce qu’elle conduit à supprimer la personne que la société a pour raison d’être de servir, est ce qui s’oppose le plus directement et de manière irréparable à la possibilité de réaliser le bien commun. Il s’ensuit que, lorsqu’une loi civile légitime l’avortement ou l’euthanasie, du fait même, elle cesse d’être une vraie loi civile, qui oblige moralement. (n. 72)
L’avortement et l’euthanasie sont donc des crimes qu’aucune loi humaine ne peut prétendre légitimer. (n. 73)
Coopération au mal ?
Pour éclairer ce problème moral difficile, il faut rappeler les principes généraux sur la coopération à des actions mauvaises. Les chrétiens, de même que tous les hommes de bonne volonté, sont appelés, en vertu d’un grave devoir de conscience, à ne pas apporter leur collaboration formelle aux pratiques qui, bien qu’admises par la législation civile, sont en opposition avec la Loi de Dieu. En effet, du point de vue moral, il n’est jamais licite de coopérer formellement au mal.
Cette coopération a lieu lorsque l’action accomplie, ou bien de par sa nature, ou bien de par la qualification qu’elle prend dans un contexte concret, se caractérise comme une participation directe à un acte contre la vie humaine innocente ou comme l’assentiment donné à l’intention immorale de l’agent principal.
Cette coopération ne peut jamais être justifiée en invoquant le respect de la liberté d’autrui, ni en prenant appui sur le fait que la loi civile la prévoit et la requiert : pour les actes que chacun accomplit personnellement, il existe, en effet, une responsabilité morale à laquelle personne ne peut jamais se soustraire et sur laquelle chacun sera jugé par Dieu lui-même (cf. Rm 2, 6 ; 14, 12). Refuser de participer à la perpétration d’une injustice est non seulement un devoir moral, mais aussi un droit humain élémentaire. (n. 74)
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