L’Église et l’esclavage (1/4)

Publié le 07 Avr 2025
esclavage église
> Dossier « Le christianisme face à l’esclavage »
L’Histoire tend à prouver que plutôt que ceux que l’on nomme les abolitionnistes, ce sont les changements théologiques et moraux graduellement obtenus par l’Église qui amenèrent la disparition de l’esclavage dans les sociétés occidentales chrétiennes. L’ouvrage de Jean-Pierre Montembault, Les Chrétiens et l’esclavage, retrace ce renversement moral initié par le Christ. Entretien.

 

| Quel nouveau message apporté par l’Église interdisait l’esclavage ?

L’Église est la première à avoir montré que la liberté n’est pas collective mais individuelle. Elle est née au milieu de civilisations qui considéraient la liberté comme collective: il s’agissait d’un privilège d’une cité, par exemple, ou d’une ethnie. Elle n’était pas un droit naturel. L’esclavage faisait partie de la société. On ne se demandait pas si c’était une pratique juste ou immorale. L’état normal de l’immense majorité de l’humanité était la servitude. Posséder de nombreux esclaves était un signe de richesse et de puissance. Tout le monde, esclaves compris, pensait cela. L’originalité du message de l’Église est de dire que l’on est libre à partir du moment où l’on est homme. Nous sommes tous égaux aux yeux de Dieu. Le caractère sacré de l’homme est universel puisque tous les hommes sont nés d’un seul couple, créés à l’image de Dieu, sublimés par l’Incarnation et sauvés par Jésus-Christ dans la Rédemption. Par comparaison, les autres sociétés prônaient l’inégalité entre les hommes en tant qu’êtres humains pour différentes raisons. Certaines ne faisaient pas de distinction entre nature et humanité, ce qui mène à l’animisme ou au panthéisme, et nie le caractère sacré de l’être humain. D’autres considéraient que les hommes ne sont pas égaux par nature. Ce type de raisonnement aboutit à hiérarchiser les êtres humains, ce qui mène logiquement à l’esclavage.

| De quelle manière l’Église s’est-elle opposée à l’esclavage et est-elle parvenue à un changement des mentalités ?

L’Église s’oppose à l’esclavage mais pas à la manière d’idéologues qui veulent, par la force, faire un homme nouveau en faisant table rase du passé. Sa méthode a été pragmatique : apporter de nouvelles valeurs pour induire de nouveaux comportements, humaniser la pratique de l’esclavage, la réglementer pour la rendre plus supportable, et en même temps, saper ses fondements philosophiques. Sachant que l’homme a une tendance à l’esclavage depuis le péché originel, elle a choisi le principe de réalité en trouvant des solutions donnant-donnant, évitant ainsi des réactions…

Pour continuer à lire cet article
et de nombreux autres

Abonnez-vous dès à présent

Marguerite Aubry

Marguerite Aubry

Ce contenu pourrait vous intéresser

À la uneÉgliseCarêmeLiturgie

Le temps de la Passion

L'esprit de la liturgie | Les derniers jours avant la célébration de la Passion sont empreints d'austérité et d'appel à la pénitence. Une invitation de la liturgie à suivre le Christ dans son don de lui-même.

+

carême passion
À la uneÉglise

Quelle évangélisation pour le monde ?

Carte blanche de Judith Cabaud | Comment reprendre la mission des origines et l'évangélisation du monde ? La seule réponse au problème qui me vient à l’esprit est de continuer ce que Jésus nous laisse entrevoir : une amplification de l’éducation chrétienne de la raison pour discerner le Bien du Mal. Les deux aspects qui s’imposent pour développer la raison sont la science, qui nous décrit l’ordre du monde, et l’art, par sa beauté, qui purifient nos âmes devant la face de Dieu.

+

évangélisation
À la uneCultureLectures

Ce que nous devons à l’Église

Historien spécialiste de l’Église, Christophe Dickès a récemment publié un essai vigoureux, Pour l’Église. Ce que le monde lui doit, rappelant la dette du monde envers elle et qui s’élève ainsi à une réflexion profonde sur la mémoire et l’Histoire.

+

pour l'église Christophe Dickès
ÉgliseAnnée du Christ-Roi

Royauté du Christ et mission

L'Essentiel de Thibaud Collin | En toutes circonstances, le Christ est roi de l’univers, ainsi que nous le rappelait Pie XI, il y a un siècle. Mais dans notre pays redevenu terrain pour la mission, c’est aux baptisés de le faire connaître et de le faire aimer, afin qu’il soit reconnu comme tel et que soit réalisé au mieux le Royaume.

+

christ-roi