L’abbé Louis-Edouard Cestac, béatifié à Bayonne le 31 mai 2015

Publié le 26 Mai 2015
L'abbé Louis-Edouard Cestac, béatifié à Bayonne le 31 mai 2015 L'Homme Nouveau

L’abbé Cestac, béatifié à Bayonne le 31 mai prochain, est bien un enfant du pays, né à l’ombre de la cathédrale le 6 janvier 1801, fils du chirurgien militaire de la ville, d’origine gasconne, et issu d’une famille basque espagnole par sa mère. Mais c’est surtout une grande figure de la charité sociale qui va être portée sur les autels.

À l’âge de 15 ans, il est entré au petit séminaire d’Aire-sur-Adour. Puis il sera successivement élève du grand séminaire de Bayonne, du prestigieux séminaire Saint-Sulpice à Paris, avant de devenir professeur au petit séminaire de Larressore alors qu’il n’était pas encore prêtre. Le jour de son ordination, le 17 décembre 1825, il se consacra intérieurement à la Vierge Marie : « Très Sainte Vierge, je vous offre mon cœur, mes mains, toute ma personne ». Toute sa vie sacerdotale et la congrégation religieuse qu’il fondera plus tard seront marquées par cette dévotion. Vers la fin de sa vie, en 1863, il composera une prière à la Vierge Marie, « Auguste Reine ». Cette prière qu’il a « reçue » sera approuvée par son évêque puis par Rome, se répandra dans le monde entier et reste aujourd’hui une source d’innombrables grâces.

Mais l’enseignement spirituel de l’abbé Cestac ne se résume pas à cette seule note mariale. C’est une spiritualité fondée sur trois convictions fondamentales qui peuvent guider la vie quotidienne : rechercher la volonté de Dieu, considérer toujours les situations d’un point de vue surnaturel, placer toute sa confiance en la Vierge Marie.

Notre-Dame du Refuge

L’abbé Cestac fut professeur au petit séminaire de Larressore de 1821 à 1831, puis il fut nommé vicaire à la cathédrale de Bayonne. Il y accomplit un ministère traditionnel au secours des âmes : messes, sermons, confessions. Il se consacra aussi à un apostolat extérieur, en visitant les pauvres, les malades et les quartiers un peu éloignés de la cathédrale. Assez vite, il fut confronté à une misère très répandue à cette époque dans Bayonne : de très jeunes filles livrées à elles-mêmes dans les rues, orphelines ou délaissées par leurs parents. Pendant plusieurs années, l’abbé Cestac essaya de leur venir en aide individuellement. Puis, à partir du mois de juin 1836, il commença à accueillir celles qu’il appelait les « Orphelines de Marie » dans une petite maison, « le Hougassé ». Une pieuse personne et quelques jeunes filles, parmi lesquelles sa sœur Élise Cestac, l’aidaient dans cette œuvre. Il est à noter que la charité telle que la conçoit et la pratique l’abbé Cestac ne consiste pas seulement à donner le gîte et le couvert à ses Orphelines. Il se soucie aussi de leur âme, de leur formation et de leur réinsertion dans la société. Il leur fait donner une première instruction, religieuse et profane, les fait former aux travaux domestiques de base pour qu’elles puissent être « placées » chez des particuliers.

L’année d’après, à la fin de 1837, les circonstances amenèrent l’abbé Cestac à recueillir deux jeunes prostituées, qui voulaient sortir de leur condition et changer de vie. Ces converties, appelées Pénitentes de Marie, furent accueillies d’abord au Hougassé. Puis, à la fin de 1838, grâce à des dons et à des crédits, l’abbé Cestac put acheter un domaine agricole, à Anglet, non loin de Bayonne, où les Pénitentes pourront changer de vie, loin des tentations de la ville, et vivre de leur travail. Le domaine sera appelé Notre-Dame du Refuge. Progressivement, les jeunes filles qui s’occupent des Orphelines et des Pénitentes vont recevoir le nom de Servantes de Marie et devenir une congrégation religieuse (les premiers vœux sont prononcés le 6 janvier 1842). La sœur de l’abbé Cestac, Élise, qui l’aida dès les débuts de l’œuvre, devient sœur ­Marie-Madeleine et peut être considérée comme la cofondatrice de la congrégation.

À la fin de 1841, l’abbé Cestac, pour répondre à une demande, engage les Servantes de Marie dans une œuvre supplémentaire : le service dans les écoles et les institutions ecclésiastiques. Les religieuses assureront l’infirmerie et la lingerie, et parfois la cuisine, au Collège royal de Toulouse, dans les séminaires d’Oloron, de Larressore, d’Aire-sur-Adour et au collège catholique d’Hasparren. Puis en 1851, sollicité par des fidèles, l’abbé Cestac va commencer à ouvrir des écoles primaires pour les filles dans les campagnes. Avec l’aide d’une ancienne maîtresse d’école devenue Servante de Marie, sœur Marie-de-Saint-Jean, il va former lui-même certaines de ses religieuses au métier d’institutrice. Il va même élaborer une nouvelle méthode pour apprendre à lire, écrire et les premiers rudiments de l’orthographe (le Syllabaire, publié en 1852).

Des Servantes de Marie vont être envoyées dans des villages ou de modestes bourgades pour ouvrir des écoles, souvent à classe unique. Les trois premières ouvriront à Maslacq, à Castétis et à Moumour, dans l’actuel département des Pyrénées-Atlantiques, puis très vite d’autres seront ouvertes. À la mort de l’abbé Cestac, les Servantes de Marie avaient plusieurs milliers d’élèves dans les quelque 150 maisons qu’elles dirigeaient dans diverses régions et en Espagne.

Homme aux talents multiples

À Notre-Dame du Refuge, où Orphelines, Pénitentes et pensionnaires étaient de plus en plus nombreuses, au fil du temps ce seront des centaines de bouches qu’il faudra nourrir. Pour cela, l’abbé Cestac, homme aux talents multiples, va se faire agriculteur, éleveur, agronome et même pisciculteur. Il s’instruisit dans des manuels d’agriculture, s’abonna à des journaux spécialisés, expérimenta, innova. Notre-Dame du Refuge va devenir une ferme-modèle et l’abbé Cestac remportera plusieurs prix aux concours agricoles de la région.

À sa mort, le 27 mars 1868, l’abbé Cestac laissait une congrégation riche de plus de 900 Servantes de Marie professes, auxquelles s’ajoutaient plusieurs dizaines de postulantes et de novices et 50 Bernardines (des Pénitentes qui s’étaient engagées dans une vie religieuse pénitente et contemplative). La congrégation religieuse rayonnera au XXe siècle sur plusieurs continents, jusqu’en Inde et en Amérique latine.

Trente ans après la mort de l’abbé Cestac, son procès de béatification a été ouvert. Les Procès seront menés avec sérieux et une très grande rigueur, notamment à travers une Inquisitio qui répondra de façon détaillée à différentes difficultés d’ordre historique et biographique. Paul VI promulguera, en 1976, un décret reconnaissant l’héroïcité des vertus de l’abbé Cestac et, le 13 juin 2014, la reconnaissance du caractère miraculeux d’une guérison survenue par son intercession a ouvert la voie à sa béatification.     

Pour aller plus loin : Yves Chiron, Louis-Édouard Cestac, Artège, 248 p., 18,90 €.

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